Un coup de coeur de Mollat
Le 22 novembre 1963, Al Kenner abat sa grand-mère d'un coup de fusil dans le dos ne supportant plus le son de sa voix. Quelques instants plus tard, il tue également son grand-père pour lui éviter la peine d'apprendre le décès de sa femme. Après les deux meurtres, le jeune homme prend la fuite avec la voiture de son grand-père et va tracer la route dans tout l'État. Il finira par se rendre lui-même aux autorités stupéfaites, quelques heures plus tard.
Reconnu irresponsable de ses actes, Al va passer cinq ans dans un asile psychiatrique dont très peu de patients ressortent. Doté d'un QI de plus de 140, le jeune homme va apprendre les termes relatifs à la psychiatrie et très vite son intelligence et son calme apparent vont faire de lui un patient respecté par tous, détenus et médecins. Finalement Al obtiendra le droit de retourner à une vie normale. Mais quelle vie et quelle liberté un homme rongé par ses pulsions peut-il espérer ? Car jamais Al n'a eu l'illusion de pouvoir accéder à la normalité.
« Romancer un personnage,c'est le trahir pour mieux servir ce que l'on pressent de sa réalité. » Marc Dugain
Pour créer son personnage, l'auteur s'est très largement inspiré du tueur en série Ed Kemper, qui sévit à Santa Cruz en Californie dans les années 70 avant d'être arrêté et enfermé pour le reste de ses jours. Dugain ne choisit pas de donner un visage humain à son personnage mais il lui donne une voix. Et tout le long du livre nous suivons sa voix, sa pensée, pour tenter de décortiquer la psychologie complexe tantôt inhumaine tantôt désespérée de cet homme qui ne sait pas comment en être un.
Le travail de reconstitution et l'imagination de Dugain font de Avenue des Géants un grand roman à la fois captivant et obsédant.