A nouveau les histoires se tissent, se croisent et se répondent, s'enchevêtrent ou se répètent.

Tout pourrait commencer par « Il était une fois » mais c'est par une vision ou plutôt un rêve que le roman s'ébroue, un rêve comme une prémonition des changements à venir. Ils n'ont pourtant rien demandé à personne les saltimbanques du Puits aux anges, cette ancienne mine hantée par d'étranges et sombres histoires. Et surtout pas à vivre comme tout le monde entassés, les yeux rivés à la télé, rêvant de choses inutiles et grotesques. Même si leur chapiteau tombe en lambeaux, même si le lion est miteux, le clown triste, et la belle trapéziste brisée, ils veulent croire encore que « l'avenir n'a pas cette gueule de misère ».

Dès les premières pages -somptueuses-, le lecteur sait déjà que son cœur va battre plus vite, que ses yeux vont être fascinés par la lanterne magique que Stéphane Servant a mise en action. Et en effet les promesses sont tenues jusqu'au bout, jusqu'au dernier souffle. Ses saltimbanques oubliés de tous se battent sans relâche entre eux mais surtout contre eux-mêmes, pour préserver cette liberté chèrement acquise et tenter de « faire briller ce qui reste de beauté dans ce monde d'infinie solitude ». Chez Stéphane Servant l'émotion est là, à chaque page vibrante d'une vie qui fait chavirer ses personnages en équilibre fragile sur le fil tendu entre la naissance et la mort. Sur le chemin, des peines, des joies, des colères, des épreuves. Et l'amour bien sûr. Ses saltimbanques sont de ceux que l'on raille, que l'on moque parce qu'ils sont différents, que l'on envie parce qu'ils sont libres et qu'ils ont le don de nous faire croire encore au pouvoir sans limite de l'imaginaire, à ces histoires dont nos vies se nourrissent et dont nous faisons notre miel.

Si vous êtes de ceux qui croient à « l'obscure magie » des mots, ce livre est pour vous, La beauté est là, couchée dans la blancheur des pages, et n'attend que le regard fasciné des lecteurs, qui sans doute, en sortiront changés,


« Celui qui sait lire peut comprendre le monde. Celui qui écrit peut le changer ». Stéphane Servant