Un coup de coeur de Mollat
1er janvier 1989, David Simon, journaliste aux affecté à la rubrique faits divers du journal The Baltimore Sun, prend un congé sabbatique pour suivre en immersion totale la brigade criminelle de Baltimore pendant une année. De cette chronique tenue au jour le jour va aboutir un livre « Homicide: A Year on the Killing Streets » (traduit en France sous le titre Baltimore) qui sera adapté en série télé quatre ans plus tard par Barry Levinston et Tom Fontana qui engageront Simon comme scénariste.
Loin du cliché de l'Amérique blanche des classes moyennes, la ville de Baltimore a pour particularité d'avoir le taux de criminalité le plus élevé des États-Unis. C'est cette donnée qu'a très vite intégrée David Simon, faisant de ce point de fixation sociétal l'élément central de son œuvre. Construite avec une extrême rigueur sociologique et un souci du détail incroyable, cet exercice que les Américains appellent le « narrative journalism » va se transformer au fil de la lecture en un récit haletant et grandiose à tous égards, une œuvre culte sur les spécificités du crime américain, sur fond de trafic de drogue, persécutions raciales et politiciens corrompus.
Ce premier livre, combiné à une seconde année en immersion auprès des junkies de La Fayette Street, va servir de terreau pour une œuvre dépassant le cadre strict de la série télévisuelle : The Wire. Plus qu'une série, The Wire est un monument de la culture américaine des années 2000 construit comme un mélange entre un exercice de cultural studies et l'Enfer de Dante. Œuvre inépuisable dont les références hantent encore ceux qui l'ont vu plus de dix ans après sa première diffusion.
La découverte de ce pavé de neuf cent pages, une vingtaine d'années après sa publication outre atlantique est toute à la fois un choc et une confirmation : David Simon est plus qu'un journaliste, c'est un grand écrivain.