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Affaires et histoires, quelques brèves du moment

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Publié le 29/09/2006
Deux "affaires" pointent cette semaine les limites des débats d'idées.

Robert Redeker enseigne la philosophie à Toulouse. Il est également connu comme l'un des membres du comité de rédaction de la revue Les Temps modernes. Habitué du débat et fervent partisan de la polémique en gants de boxe, il a coutume de publier dans divers journaux, de Libération au Figaro, des tribunes dont le principal trait n'est pas la modération. C'est d'ailleurs l'une d'elles qui lui vaut de vivre caché afin d'éviter que soient mises à exécution les menaces de mort dont il est désormais l'objet.

Le 19 septembre, Robert Redeker publiait dans Le Figaro une tribune intitulée « Face aux intimidations islamistes, que doit faire le monde libre ? » dans laquelle, en bon tenant de la tradition polémiste française, il attaquait fort violemment L'Islam et son prophète en des termes violents et définitifs : Mahomet y est décrit comme un « pillard massacreur de Juifs et polygame », l'Islam comme une religion prônant la violence et Le Coran comme une livre « d'une inouïe violence ».
Le lendemain, le répondeur téléphonique de Mr Redeker se trouvait saturé de messages le menaçant de mort. Peu après, apparaissaient sur des sites extrémistes diverses incitations à la mise à exécutions des dites menaces ainsi que divers plans situant son domicile ou d'autres indications sur ses lieux et habitudes de travail.. Obligé de fuir et de se cacher « quelque part en France », Robert Redeker doit aujourd'hui sa sécurité à divers agents des forces de l'ordre qui veillent sur lui.
Si l'on peut comprendre l'indignation des lecteurs musulmans du Figaro au vu des propos de l'auteur, qui eût mieux fait de tourner sept fois sa plume dans l'encrier – et au passage d'en profiter pour relire Bible et Coran, avant de s'en prendre ainsi au Livre de l'Islam, on s'étonnera du silence poli qu'oppose à cette affaire le monde intellectuel dans sa presque totalité. Le droit d'exercer sa liberté d'opinion concerne également les idées détestables et ceux qui les professent.

Venons-en maintenant à la fortune posthume de Martin Heidegger (photo). Une longue affaire connaît ici un nouveau rebondissement, il s'agit de la désormais inévitable dispute entre les tenants d'un Heidegger soit innocent, soit opportunément rallié aux idées nazies pour cause de carriérisme – ou de myopie historique, c'est selon – et ceux qui trouvent dans la philosophie du maître allemand de nombreux points communs ou correspondances avec l'idéologie meurtrière.

François Fédier, philosophe et défenseur acharné de la cause heideggerienne vient de faire les frais d'une bataille d'idées qui a failli se terminer au prétoire. En effet, en réponse à un ouvrage d'Emmanuel Faye intitulé Heidegger : l'introduction du nazisme dans la philosophie, François Fédier avait conçu le projet d'un ouvrage réunissant des contributions de divers philosophes et historiens des idées pour réfuter point par point les opinions de son adversaire académique. L'ouvrage était alors annoncé pour le mois de mars 2006, plusieurs jeux d'épreuves furent expédiés aux journalistes et un compte rendu devait paraître dans la revue Philosophie magazine. Le temps passa, l'ouvrage ne vint point. Le 4 août, l'éditeur fait savoir à l'auteur que le contrat qui les liait est désormais caduc. Explications prises par le journal Le Monde, il semblerait que la violence des propos de certains collaborateurs de l'ouvrage envers Emmanuel Faye ait inquiété les avocats de l'éditeur au point de leur faire redouter un procès. La décision fut donc prise de ne plus publier le livre. Souhaitons que la publicité donnée à ce mini-scandale microcosmique donne à d'autres éditeurs l'idée de contacter monsieur Fédier dont l'ouvrage est désormais libre de droits.

A suivre…