Un coup de coeur de Emilie S.
S'emparer de la question complexe du genre, c'est ce qu'ont fait trois auteurs dans des textes aussi différents qu'intéressants. Ces notions complexes d'identité trouvent une nouvelle résonance que tout lecteur ne peut qu'apprécier.
Tout d’abord le très touchant Mon fils en rose de Camilla Vivian aux excellentes éditions La Contre-allée. Ce récit met en scène les interrogations d’une mère face à son fils. Depuis son plus jeune âge, celui-ci manifeste une appétence toute particulière pour le rose, les paillettes, tous les signes extérieurs de ce que l’on attribue généralement aux petites filles. Cela ne poserait pas de problème à cette mère si socialement ces marqueurs de soi-disant féminité n’étaient pas très mal perçus dès que cela concerne un garçon. Camilla tente de laisser son fils le plus libre possible de ses choix et de ses goûts mais se heurte vite à une société somme tout très rigide : que ce soit à l’école, à la piscine, le regard des autres est très pesant. Mon fils en rose dit aussi les non-réponses que la société européenne renvoie aux parents d’enfants dits « dysphoriques de genre ». Un écrit, au plus près du réel, du quotidien, qui loin de laisser indifférent son lecteur ouvre au contraire une réflexion sur le propre regard qu'il peut avoir sur cette notion de genre.
Encore un récit personnel avec Darling Days de Io Tillet Wright paru en français aux éditions du Seuil. Cette fois-ci, une jeune narratrice se raconte dans le New York bohème tendance trash des années 80:une mère défaillante, un père artiste lointain vivant à Berlin. Une existence pauvre, très cabossée pour Io, petite fille puis adolescente qui mène sans fard le projet de narrer sa formation d’identité. Darling Days est un véritable récit d’apprentissage interrogeant le genre. L’auteur est par ailleurs un célèbre porte parole de la communauté LGBT aux États-Unis.
On n’a que deux vies : journal d’un transboy d’Adel Tincelin est publié par les Éditions Cambourakis. Adel Tincelin livre dans un journal intime écrit au fil des mois une partie de sa vie : celle dans laquelle, elle comprend qu'elle se sentirait mieux en garçon qu' en fille et envisage de faire une transition. Le lecteur vit avec l'auteur les doutes, les émotions, les peurs mais aussi la drôlerie de certaines situations. Changer de genre c'est aussi apprendre et réapprendre : le je du journal se fait l'écho de cette quête dans laquelle l'écriture de soi est doublement au centre.