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Le sport participe-t-il à la construction de l'identité européenne ?

Publié le 20/05/2014
Dossier de Jean-Pierre Augustin, Professeur de géographie et d'aménagement à l'Université Bordeaux-Montaigne
En un peu plus d'un siècle, le sport moderne et les cultures sportives qui lui sont liées sont devenus un genre commun qui favorise des pratiques communes sur l'ensemble de l'Europe. Au-delà des récits journalistiques et des images sportives qui inondent le paysage médiatique en ne parlant que des résultats et en valorisant l'épopée des champions, ce phénomène mérite attention. L'analyse des diffusions, des pratiques, des équipements et des compétitions montre que l'Europe est devenue une maison commune du sport et que ces cultures sportives participent, plus qu'on ne le croit, à la spécificité et à la construction de l'identité européenne. Le sport contemporain est né en Europe au XIXe siècle et c'est aussi en Europe qu'il s'est organisé, notamment à partir de l'Angleterre, son berceau, et de la France, matrice de l'olympisme.

Il existe, évidemment, une étroite corrélation entre les foyers de création du sport et les zones actuelles de pratique. L'Europe reste le secteur, avec l'Amérique du Nord, où les sports de compétition et les sports de loisir sont les plus développés. L'hypothèse que ces pratiques participent à la construction d'une identité européenne mérite d'être posée.

Devenues des cultures spécifiques, les épreuves sportives et olympiques, mais aussi les activités loisirs sportifs, ne se réduisent pas aux pratiquants, aux stades et aux compétitions. Les milliers d'images (photographies, films, vidéos, images numériques...) représentent le phénomène dans les médias, parfois le précèdent et en tout cas le construisent. Dans ce jeu, ces médias n'ont pas un simple rôle d'information ; en présentant l'Europe comme la maison commune du sport, ils l'énoncent c'est-à-dire qu'ils l'inventent.

L'EUROPE ET LA CRÉATION DU SPORT MODERNE.

Les historiens du sport sont d'accord pour considérer que c'est en Angleterre, à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, dans un contexte de mutations économiques et sociales, que les nouveaux jeux sportifs se codifient. Leur diffusion en Europe est rapide, elle n'est cependant pas continue dans le reste du monde où le particularisme américain et les foyers secondaires de création au Japon renforcent encore la spécificité européenne.

L'Angleterre et ses innovations.

Les progrès techniques, les changements sociaux, l'évolution politique ont pris des formes particulières outre-Manche, rappelant à l'évidence que vis-à-vis de l'Europe, l'Angleterre est une île. Évitant les révolutions multiples du continent, le système socio-économique britannique se transforme progressivement alors que s'inventent de nouveaux rapports institutionnels. La création du sport contemporain bénéficie dans ce contexte de trois conditions particulières : l'existence de jeux traditionnels à l'époque pré-industrielle, la valorisation des pratiques sportives pour les jeunes de l'élite anglaise dans les public schools de 1820 à 1870, et enfin l'utilisation de ces nouveaux sports codifiés par les divers groupements de la société urbaine et industrielle. En Angleterre, comme en Europe occidentale, des jeux et des activités physiques se sont créés et développés. Les tournois, les joutes, le jeu de paume, la soule, la chasse, l'équitation, l'escrime ont connu des progressions variables selon les temps et les lieux sociaux. Jeux populaires et pratiques distinctives se côtoient sans se pénétrer. A partir de cette double influence populaire et aristocratique, c'est l'appropriation par le système éducatif, de pratiques corporelles de plein air qui est décisive. Les publics schools deviennent un laboratoire d'inventions du sport moderne. Ces établissements sont au cœur de la diffusion de la culture bourgeoise dans la Grande-Bretagne du XIXe siècle. Ils offrent les lieux de formation idéaux pour les marchands et les aristocrates dans une société industrielle en gestation qui vise à produire les commerçants, les industriels, les juristes, les médecins, les fonctionnaires et les universitaires les plus efficaces. Les éducateurs anglais, cherchant à définir une pédagogie qui convienne au nouvel ordre industriel, utilisent dans la première moitié du siècle les jeux sportifs pour canaliser l'ardeur des élèves. La formule "mens sana in corpore sano" est appliquée dans un contexte bien analysé par l'ouvrage de Thomas Hughes en 1856, "Tom Brown's school days".

C'est au collège de Rugby que, d'après la légende, l'élève William Webb Ellis saisit un jour la balle à pleine main et, à l'encontre des pratiques habituelles, la porte dans ses bras dans les buts d'en face. Ce geste fondateur, présenté comme une transgression, apparaît en réalité comme une reconstitution plus proche d'une structure mythologique que de l'histoire. La légende témoigne cependant de la diversité des règles des jeux sportifs existant à l'époque du football préindustriel de 1820 à 1863. L'idée d'opposer entre elles les équipes représentatives des collèges et des universités permet l'essor du mouvement et provoque surtout l'unification des règles. Les rencontres suscitent un intérêt croissant, symbolisé par celles, sur les bords de la Tamise, des équipes d'Oxford et de Cambridge qui s'affrontent chaque année depuis 1836. L'extension du réseau ferroviaire national en 1845 favorise les compétitions scolaires et leur diffusion dans les sociétés civiles. D'anciens élèves souhaitant continuer à jouer après l'école, créent les premiers clubs dans le sud de l'Angleterre sur une base d'amateurisme pur et la nécessité d'élaborer des règles communes pour tous devient impérative dès le début des années 1860. En octobre 1863 est fondée la Football Association qui organise en 1871 un tournoi, et la coupe nationale remportée jusqu'en 1882 par les équipes d'amateurs du sud, composées généralement d'anciens joueurs des public schools. A partir de cette date, un changement majeur se produit avec la victoire d'une équipe semi-professionnelle du nord. Le football devient un sport ouvrier encouragé par les églises, les écoles, les associations de quartiers et les entreprises qui y voient un moyen d'intégration urbaine. L'hégémonie du nord et des Midlands correspond au processus de démocratisation du sport s'accompagnant de dérives professionnelles. En 1888, le football professionnel se dote de structures propres en créant l'English Football League avec une première division suivie d'une seconde en 1890. Solidement établi à la fin du siècle en Grande-Bretagne, le football anglais va conquérir d'autant plus facilement le reste de l'Europe qu'au-delà de son empire l'influence britannique est considérable. Quelques clubs des districts de Londres refusent la règle du jeu sans les mains et constituent en 1871 la Rugby Union qui permet une diffusion rapide, mais limitée grâce à une solide organisation internationale. C'est à partir des règles codifiées par les associations sportives nationales anglaises que les sports sont exportés dans l'empire britannique, en Europe et dans les autres continents. En France, le premier club sportif, le Havre Athletic Club est fondé en 1872, mais c'est après les années 1880 que les associations sportives sur le modèle anglais se multiplient. Généralement introduits par des résidents britanniques, le rugby et le football anglais se diffusent grâce notamment aux matchs de démonstration. Hormis la régionalisation du rugby dans le Sud-Ouest de la France, le football devient le sport d'équipes dominant en Europe, alors qu'aux États-Unis de nouveaux jeux s'élaborent dans un contexte particulier. Mais c'est l'olympisme qui, en modernisant les jeux grecs, universalise les pratiques sportives.

L'olympisme et la matrice française


Le rôle joué par Pierre de Coubertin dans la rénovation des Jeux olympiques est alors décisif pour l'universalisation du mouvement sportif. Coubertin (1863-1937) est séduit, lors de ses séjours en Angleterre, par les méthodes éducatives des collèges où le sport tient un rôle central. Il rédige de nombreux articles et ouvrages dans le but de les vulgariser et milite d'abord pour la création d'associations scolaires en France. Il participe directement à la gestion de l'Union sportive française des sports athlétiques (USFSA) dont il devient secrétaire en 1890. Il imagine ensuite créer des jeux olympiques modernes, idée portée par les tendances internationales de l'époque. Les expositions universelles, les échos du sport dans la presse, l'amélioration des transports favorisent l'organisation des compétitions entre les nations. Évoquée dès 1892 dans l'amphithéâtre de la Sorbonne après avoir été envisagée à plusieurs reprises, la proposition de rénover les Jeux est acceptée deux ans plus tard, dans le même lieu, lors d'un congrès international universitaire et sportif convoqué à cet effet. Les premiers Jeux olympiques modernes sont prévus à Athènes en 1896, puis à Paris en 1900, alors que se constitue un Comité international olympique (CIO). Les fondements d'un système mondial sportif sont nés en Europe et les jeux, en mettant en scène tous les quatre ans les nations dans des lieux diversifiés, favorisent l'apparente universalisation du sport, mais ce sont les villes majoritairement européennes qui accueillent ces jeux jusqu'en 1992.

La réussite de l'olympisme est liée à trois éléments : la puissance d'une dramaturgie contemporaine, la force politique d'une gouvernance mondiale et l'impact médiatique d'une cérémonie planétaire. L'olympisme n'est cependant pas indépendant des enjeux économiques et géopolitiques. Il s'inscrit dans une gouvernance soumise à des pressions extérieures où l'Europe et les États-Unis maintiennent leur prépondérance historique. Il est un théâtre où les succès sont confisqués par les pays les plus riches puisqu'aux jeux de Sydney, 99 Comités nationaux olympiques (CNO) n'ont aucun finaliste alors que 6 CNO, dont 4 Européens, en totalisent plus de 100.

L'Europe, au centre du sport mondial

La dimension européenne du sport et la répartition des pratiques sont des thèmes peu travaillés pour plusieurs raisons. La première vient de l'insuffisance des données statistiques et de l'absence d'organismes susceptibles de les traiter. Le Comité olympique n'a pas pour mission de faire cet inventaire et seules les fédérations internationales gérant un sport parviennent à suivre l'évolution des effectifs recensés dans chaque pays. Une deuxième raison est liée à la définition polysémique du sport et aux différentes façons de pratiquer. Sports de compétitions institutionnalisés, sports de loisirs organisés ou pratiques informelles se mêlent dans la réalité et ne sont pas pris en compte de la même manière selon les pays. Enfin une dernière raison résulte de la multiplication et de la segmentation incessante des sports qui complexifient les comptages des pratiquants. Face à cette situation, la prudence s'impose mais il reste possible de souligner l'importance du sport européen et de sa spécificité.

L'Europe constitue la première zone sportive mondiale si l'on tient compte du nombre de pratiquants, de licenciés, de spectateurs, d'équipements et des grandes manifestations organisées. Il faut évidemment distinguer l'Europe de l'Ouest où le sport a débuté et les pays de l'Est où le communisme a forgé des pratiques particulières. En Europe de l'Ouest, la Grande Bretagne, la France, l'Allemagne, la Suisse et le Bénélux forment un ensemble de bon niveau de pratique institutionnalisée et de loisir. Les pays scandinaves, le Danemark, la Suède, la Norvège et la Finlande bénéficient d'une longue tradition fondée sur la gymnastique et les sports de plein air, alors que dans l'Europe du Sud, l'Espagne, le Portugal, l'Italie et la Grèce, les formes de pratiques plus faibles et plus institutionnalisées ont été renforcées par les régimes autoritaires qui s'y sont succédés. Dans l'Europe de l'Est, le sport a d'abord été l'affaire de l'État. Les régimes communistes y ont organisé des institutions spécifiques et édifié les équipements et certains, comme l'Allemagne de l'Est, ont fait du sport un modèle éducatif dominant. Les situations sont cependant assez variées dans les républiques de l'ancienne URSS comme dans les pays de l'Est où de fortes différences existent entre la république Tchèque, la Slovaquie, la Pologne et la Roumanie par exemple. Mais la tendance forte depuis la chute du mur de Berlin en 1989, puis l'effondrement de l'URSS est celle de l'appropriation des cultures sportives de l'Europe de l'Ouest par ces pays.

L'EUROPE ET L'ORGANISATION MONDIALE DU SPORT

Le développement du sport ne se réalise vraiment que lorsque la demande et l'offre sportives sont suffisamment développées et deux étapes se sont succédé depuis cent cinquante ans où des modèles se sont organisés et superposés, laissant à l'Europe le bénéfice et parfois le quasi-monopole d'une organisation mondiale du sport.

L'Europe et les variations territoriales des sports

La première étape de cette organisation, située avant 1940, est pratiquement limitée aux pays développés et aux sports d'origine européenne auxquels il faut ajouter certaines pratiques recyclées en Amérique du Nord ou au Japon. L'élément essentiel est alors la constitution de régions sportives dont l'Europe est le symbole, aux échelles locales et nationales relativement stables. Elle se termine par un partage sportif des territoires où les positions acquises peuvent apparaître comme une géographie de la maturité. Bien sûr, la diffusion des sports institutionnalisés n'est pas épuisée, notamment dans les régions où subsistent des jeux traditionnels mais la dynamique sportive se situe aujourd'hui dans un autre contexte où les logiques économiques et l'organisation des modes de vie perturbent les situations établies. La seconde étape qui se renforce après la guerre et surtout après les années soixante, brouille en partie les processus constitutifs de la géographie des sports à partir de deux niveaux. C'est d'abord une logique de marché inscrite dans l'économie monde qui entraîne une rupture avec la relative inertie des implantations sportives classiques. Antoine Haumont note : "Les nouvelles structures qui rassemblent les entrepreneurs, les médias et les institutions sportives et pour lesquelles les pratiques et les événements sont des centres de profit et doivent être créés ou défaits, localisés ou délocalisés, avec la même rapidité que d'autres éléments du système de production et d'échanges". Le second niveau est lié à l'émergence d'un modèle extra-institutionnel qui intéresse l'ensemble des espaces monde mais aussi l'ensemble des espaces des modes de vie. Les randonnées, les courses autour du monde à la voile, les traversées du désert ou du Grand Nord s'inscrivent dans cette logique où le monde entier a vocation à devenir un espace sportif. Dans le même temps, le sport envahit des espaces publics (sports de rue, vélo, jogging, basket des playgrounds) et les espaces privés (exercices au domicile, centres de forme dans les entreprises...). Là encore, les initiatives sont majoritairement européennes. Ces nouvelles données ne détruisent pas les situations sportives acquises et fortement enracinées dans l'espace européen ; et dans bien des cas, elles complètent les identités sportives établies en intéressant de nouvelles classes d'âges et de nouveaux groupes sociaux. Le sport n'échappe cependant pas à l'instauration de cultures et de pratiques monde générées par les éléments économiques et communicationnels. Les institutions sportives internationales majoritairement européennes dont le pouvoir n'a cessé de s'affirmer depuis un demi-siècle restent, même si elles sont également touchées par ces évolutions, un garant des règles et de l'universalisation des pratiques.

La domination européenne de l'organisation mondiale du sport

Codifiées pour la plupart dans les pays européens, les disciplines sportives sont organisées à partir de fédérations internationales qui règlementent les compétitions et proposent les calendriers de rencontres. Chaque sport étant géré par une fédération internationale, l'analyse de la localisation de leurs sièges administratifs ainsi que celle de la nationalité des présidents permet de mettre à jour les fondements de l'organisation. Enfin, la localisation des compétitions internationales qui se sont déroulées au tournant du XXe siècle amène à un bilan d'ensemble. Ces indicateurs confirment la domination européenne de l'organisation mondiale du sport.

La localisation des fédérations internationales.

Les fédérations internationales sont d'abord créées en Europe, parfois avant les instances olympiques puisque par exemple, pour la France, la fédération de gymnastique date de 1881 et celles de l'aviron et du patinage de 1892 ; les exemples sont encore plus nombreux pour les fédérations nées en Angleterre et même en Allemagne. Depuis la mise en place du Comité international olympique, il convient de distinguer entre les fédérations olympiques (FIO) au nombre de 29 en 1990 et les fédérations non olympiques (FINO) au nombre de 45 à la même date. L'étude de leur localisation montre un quasi-monopole d'implantation des fédérations internationales olympiques en Europe puisque 27 sur 29 y ont leur siège. La Suisse, en plus du CIO installé à Lausanne, en accueille 9 à elle seule (football, hand-ball, volley-ball, gymnastique, patinage, équitation, aviron, ski et lutte) et la Grande-Bretagne 6. Hors de l'Europe, seul le Canada est le siège de la fédération de natation et le Japon celui du judo. La nationalité des présidents des FIO change peu de chose à cette situation, même si l'Amérique se voit dotée de 4 présidences, l'Asie de 2 et l'Afrique et l'Océanie d'une. A noter cependant que dans 7 cas seulement sur 29 le siège et la présidence sont situés dans le même pays.

L'analyse de la localisation des fédérations internationales non olympiques laisse apparaître d'assez grandes différences. Le monopole européen est d'abord moins marqué puisque 15 sports sur 45 n'y ont pas leur siège. Les États-Unis accueillent 7 sièges, le Japon 2, le Canada, la Corée et l'Australie un. C'est souvent l'origine du sport dans le pays qui explique la localisation de la fédération. Ainsi le base-ball, le patinage, le softball et les chiens de traîneaux sont-ils localisés aux États-Unis ; le karaté et l'aïkido au Japon et le kendo en Corée. Cet état de fait explique aussi la plus forte représentation conjointe des lieux des sièges administratifs et de leurs présidents dans le même pays. La concentration des pouvoirs sportifs en Europe s'affirme donc ; elle n'est pas sans incidence sur le choix des lieux d'organisation des compétitions internationales.

Les compétitions internationales.


Au-delà des compétitions nationales, chaque année les fédérations internationales organisent les rencontres sportives des disciplines qu'elles gèrent. Ainsi, les tournois de tennis, les épreuves cyclistes, les championnats du monde de football, de rugby, de hand-ball et de multiples autres sports se déroulent régulièrement. Au total ce sont des centaines de grandes compétitions qui sont proposées. L'étude des lieux de celles organisées au tournant du XXe siècle montre que la presque totalité des rencontres (96%) s'effectue dans les 30 pays les plus développés, les 10 premiers d'entre eux organisant 63% des épreuves. A l'opposé, les 150 pays du Tiers-monde sont très peu concernés par ce type de compétitions et 80 parmi eux ne sont le lieu d'aucune manifestation. Parmi les nations riches, l'Europe tient une place prépondérante puisque 82% des épreuves y sont organisées. Les pays de la Communauté économique européenne sont le lieu de 56% d'entre elles et la France à elle seule en organise 13%. Cette place de l'Europe contraste avec le relatif effacement des États-Unis (3,4%) et de l'URSS (1,4%) et s'explique par le particularisme américain et le relatif isolement des pays asiatiques. D'importants changements sont cependant en cours avec la montée des pays émergents qui ont compris la nécessité d'inscrire leur nom dans le concert des compétitions internationales.

A la double légitimité liée à l'antériorité de l'Europe dans l'histoire du mouvement sportif et à son rôle politico-économique, s'ajoutent des éléments de centralité et surtout le fait que sur un espace restreint de nombreux pays offrent une concentration unique d'organisateurs, de pratiquants, de spectateurs et aussi d'équipements. Cette situation internationale renforce donc la domination européenne déjà évidente quant au nombre de pratiquants et quant à la gestion des fédérations sportives. Au-delà du retrait dans les domaines militaires, économiques et politiques faisant suite à la seconde guerre mondiale, l'Europe affirme sa prépondérance dans le domaine de la culture dont le sport fait partie.

D'une certaine manière, les compétitions internationales et les Jeux olympiques peuvent être perçus comme le théâtre où s'affichent l'inégalité, les rapports de forces et les hiérarchies économiques et politiques. Ni tout à fait simulacres, ni tout à fait guerres, les luttes sportives sont devenues des rituels modernes où l'ordre social se donne à voir et se reproduit en paraissant se dissoudre. Permettant des rencontres règlementées dans des lieux diversifiés et selon un calendrier préétabli, le mouvement sportif et olympique vise à l'instauration de pratiques universelles mais un ordre sportif international s'est constitué. Celui-ci reste dominé par les pays les plus riches du monde où l'Europe maintient sa prépondérance historique. En ce sens, on peut considérer qu'en raison des innovations, des créations, des organisations et des pratiques le sport, sous ses formes diverses, participe à la spécificité de l'identité européenne.


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