Un coup de coeur de Mollat
On apprend que ces insectes coprophages — c'est-à-dire qui se nourrissent d'excréments, vous avez sans doute en tête l'image du scarabée poussant sa jolie boulette — et qui jouent un rôle indispensable sur nos pâturages, vont disparaître de certaines zones devenant trop chaudes et trop arides, ou remonter petit à petit du Sud de l'Europe vers le Nord, perturbant les règles du qui mange qui ou quoi. Reste à savoir si d'autres espèces parviendront à prendre la relève. Un peu plus loin, on se penche sur le cas des poissons de nos rivières, et des betteraves de mer — oui, ça existe, et vous pourrez même faire sensation à votre dîner en expliquant comment l'espèce peut permettre d'évaluer les conséquences du changement climatique.
Tout au long des différents points présentés, il ne faut pas s'attendre à des positions tranchées ou de virulents plaidoyers écologiques. Cela peut parfois être frustrant. Il faut simplement toujours penser qu'on a là des travaux de recherche, et que le propre du scientifique est de rester réservé lorsqu'il n'est pas sûr, tout en expliquant le pourquoi du comment des réserves, de continuer à poser des questions. Envisagée ainsi, l'absence de coup de gueule apparaît finalement comme plutôt rassurante. Et donne d'autant plus de voix aux alertes lancées, comme lorsque deux professeurs algériens disent « l'urgence de définir une politique concertée d'aménagement et de conservation du patrimoine phytogénétique de la partie occidentale de l'Algérie ».
Peut-être un peu plus ardue scientifiquement, la deuxième partie de l'ouvrage utilise la machine à remonter le temps. Les quelques pages démontrant comment les populations de la corne de l'Afrique se sont adaptées depuis 8 000 ans sont particulièrement intéressantes. Pour finir, ethno-écologue, éco-anthropologue et ethno-biologiste nous emmènent voir ce que pensent de tout cela les peuples des forêts tropicales et de l'Arctique. On en revient à nos moutons. Où à nos rennes, plutôt. « En hiver, le pâturage est un problème, car nous avons déjà un très petit territoire, et de plus nous avons des problèmes avec l'exploitation forestière, et peut-être bientôt aussi avec les mines et le tourisme de motoneige, explique un jeune éleveur de rennes, Sàmi du Nord de la Suède. Comme le pâturage d'hiver est le plus important, le changement climatique pourrait à mon avis devenir un gros problème. Parce que le climat change, depuis des dizaines de milliers d'années, c'est arrivé souvent… mais alors nous avions des endroits où aller. Maintenant, nous n'en avons plus. »
Élodie Touret pour Écolo-Info