Un coup de coeur de Mollat
Donald Westlake est mort, Richard Stark respire encore...tout au moins dans ses inédits qui paraissent malgré la disparition du prolifique et génial auteur américain. C'est ainsi que d'outre-tombe nous parvient un nouvel épisode des aventures d'un personnage récurrent, sorte d'antithèse et de double violent du célèbre Dortmunder, ce voleur faillible aux aventures désopilantes. Avec Stark on se marre nettement moins car son héros, Parker, ne rigole pas beaucoup et on a plus tendance à frémir qu'à sourire en le suivant. Souvenons-nous de la façon dont il nous est décrit dans Comme une fleur le premier épisode, à la Série Noire : "C'était un type massif et poilu, aux épaules droites et carrées, aux bras trop longs dans des manches trop courtes (...) Ses mains, qui balançaient leurs doigts recourbés le long de ses flancs, semblaient avoir été pétries dans de l'argile brune par un sculpteur ayant le goût de la grandeur et des veines saillantes. Ses cheveux étaient châtains, secs et ternes (...) son visage était un bloc de béton mal taillé, percé de deux yeux d'onyx pailleté. Sa bouche n'était qu'une cicatrice exsangue (...) Les femmes le regardaient et frémissaient. Elles devinaient que c'était un salopard, que ses mains puissantes étaient faites pour gifler, qu'aucun sourire n'adoucissait son visage quand il regardait une fille".
Dès la première page, ce « sympathique » protagoniste tue un homme, mais ce n'est pas la pire chose qui va lui arriver car avec ce salopard on va de mal en pis, et le plaisir intense que l'on prend à le suivre tient en grande partie à cette envie de savoir jusqu'où il va nous emmener... Tout commence par une redoutable histoire de casse. Redoutable, évidemment, car les protagonistes voient leurs plans ne pas fonctionner exactement comme prévu : chez Stark, l'engrenage se grippe souvent, et la catastrophe n'est jamais loin... En bon artisan du crime, Parker essaie pourtant de tout prévoir, mais les faiblesses humaines, aussi innombrables qu'imprévisibles, l'empêchent de mener à bien des plans qui lui paraissent plutôt simples. Le coup parfait, ce grand mythe, n'existerait donc pas...
Pour ceux qui suivent Westlake, impossible de manquer ce roman. Pour ceux qui sont fidèles à Parker, ce serait dommage de manquer ce brillant et dernier 22° épisode. Pour ceux qui n'ont jamais goûté au charme perfide de ces histoires épicées, l'occasion se présente enfin. Retenez votre souffle et lancez-vous dans A bout de course! A l'heure de faire les vôtres pour les Fêtes cela vous fera le plus grand bien...