Un coup de coeur de Mollat
Un gentilhomme irlandais,Thomas-John Russell, très catholique bien sûr, épouse une aristocrate française, Marie-Ferdinande de Grossoles-Flamarens. Leur premier fils, Henry, naît en 1834 à Toulouse.
Quelques années plus tard, la famille s'installe à Pau et Henry découvre les Pyrénées avec sa mère et son petit frère, Franck. Ce mondain, élégant et contemplatif est un grand marcheur. Il trouve un épanouissement dans « ses » montagnes. Ses études terminées, en 1856, Henry embarque pour le Pérou, ce voyage dure 18 mois. Puis il part pour un second voyage vers l'Amérique du Nord ; il y fait une analyse très lucide du sort des Indiens, et il étend cette compassion aux esclaves noirs (nous sommes à 4 ans de la guerre de Sécession).
A son retour, Henry rejoint ses parents à Luz, dans les Pyrénées et il fait l'ascension de l'Ardiden et du Néouvielle. Par quatre fois, il entreprend la conquête du Mont-Perdu dans des conditions météorologiques éprouvantes.
Son projet de grand voyage reste intact, il veut repartir vers l'Asie. En 1858, il démarre un périple par la Russie, gagne la Chine, rejoint le Japon et part vers l'Australie début 1860. Il passe quelques mois en Nouvelle-Zélande et y découvre les monts Kaïkouras, il s'y égare et manque perdre la vie.
Son voyage continue vers l'Inde, l'Egypte, la Turquie….
Henry rentre en France l'été 1861 et, 15 jours plus tard fait l'ascension du Vignemale. Notre bel aventurier va tomber amoureux à Biarritz de Maud, fille d'évêque anglican. Les oppositions parentales, religieuses surtout, mais également financières sont irrévocables. Henry vit ce chagrin très difficilement et il ne se mariera jamais, malgré les insistances paternelles.
Désormais sa vie est consacrée à l'exploration des Pyrénées. Seul ou avec des guides, il entreprend de multiples courses et réalise une trentaine de « premières ».
Il fonde une société de montagnards, la société « Ramond » ; il fait fabriquer un sac en peau d'agneau pour dormir à la belle étoile ! Il réalise une première hivernale sur le Vignemale.
En 1881, Henry décide de faire creuser une grotte dans le Vignemale, considérant qu'il n'est plus de son âge de vivre à la dure ! Quelques années plus tard, devant le succès de sa « villa Russell », il fait percer une seconde caverne pour les guides. Viendra ensuite une troisième, pour les dames.
Il écrit beaucoup et publie « Souvenirs d'un montagnard ».
Il obtient une concession du Vignemale, dont la location annuelle est d'un franc. En 1904, à 70 ans, il fait sa trente-troisième ascension du Vignemale, ce sera la dernière.
Il meurt à Biarritz début 1909 et est enterré à Pau.
Henry Russell est considéré comme le fondateur du pyrénéisme et un précurseur dans l'ascension des sommets de plus de 3000 mètres.