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Non précisé.
Un coup de coeur de Mollat
Marie-Hélène Lafon manie le verbe avec brio, dans une écriture tour à tour chatoyante et ténue tant dans ses romans que dans ses nouvelles qui viennent de paraître sous forme de compilation sobrement appelé Histoires chez son éditeur Buchet-Chastel.
Qu'elle aborde son amour de la nature dans Album, magnifique ode aux éléments, ou qu'elle tisse des fictions issues de son Cantal natal bordé par la vallée de la Santoire, elle nous plonge dans une France agricole qui finit, s'étiole inexorablement. Le climat y est âpre, il s'y passe parfois des choses terribles : dans Les derniers indiens, on ne se parle pas, on s'épie, on se juge et l'on y vit dans une solitude extrême, une vie faite d'abnégation, de désillusions, de résignation, de dur labeur et on dissimule de lourds secrets, des amours avortées comme dans son dernier roman Joseph. Pourtant, dans L'Annonce, un renouveau semble attendre le couple formé par Annette et Paul.
Dans Chantiers, son dernier opus, Marie-Hélène Lafon nous parle de son itinéraire de vie, elle qui avait franchi ce cap de l'intime dans Les Pays : l'enfance en Aubrac dans les années 50-60, puis la possibilité de mener des études poussées à la Sorbonne à Paris, l'agrégation de lettres classiques, elle qui enseigne dans un lycée parisien. Elle nous ouvre les portes de son établi qui n'est jamais loin de l'étable de la ferme familiale, aimant comparer son écriture à un chantier, un travail manuel au plus près de la chair du texte, cette savoureuse et savante « viande des mots ». On retrouve dans ce récit passionnant d'une ouvrière du verbe ses auteurs de prédilection dont elle goûte la fréquentation : Flaubert, Claude Simon, Pierre Michon, Richard Millet, Pierre Bergounioux.
Lire les livres de Marie-Hélène Lafon à haute voix est un plaisir que je recommande à tous les amoureux de la littérature.