Un coup de coeur de Lucie L.
Ainsi, dès le premier chapitre, le suspect est arrêté : Jérôme Loubry impose une construction originale et sinueuse. Car si cette affaire semble réglée, elle est en réalité loin de l'être. En effet, quinze ans plus tôt, des faits similaires se sont déroulés. Les quelques indices glanés à grand peine laissent entrevoir la culpabilité d'un homme dont la taille semble exceptionnelle. Surnommé le Géant de Brume, ce monstre aux allures légendaires est insaississable malgré les efforts de l'inspecteur Stan Mitchell, qui se voue corps et âme à cette enquête. Violent, alcoolique, solitaire, Stan tombe peu à peu dans le cercle infernal de l'obsession et reste détruit par cet échec. Lorsque Sarah Berkhamp se retrouve face à ce coupable mystérieux, il saute sur l'occasion et replonge dans cette histoire douloureuse, quitte à y laisser sa santé mentale, et tente de tirer un trait sur cette affaire qui lui a coûté sa carrière et sa vie.
Ce duo de flics n’en n’est pas réellement un : la ville de Détroit impose tant son ombre oppressante et nauséabonde tout au long du roman qu’elle constitue un personnage à elle seule. Abandonnée, sale, en ruines, à l'image des victimes mais aussi de Sarah et de Stan qui vagabondent dans ses rues à la recherche du coupable, mais aussi de leurs propres limites. L'ambiance est incroyablement lourde, les motivations et le passé des personnages sont flous: surfant sur le thème de l'enfance et de la désolation d'une société en proie à des maux qu'elle s'est elle-même créée, Jérôme Loubry s'invite dans un registre déjà bien installé dans le domaine du polar mais y ajoute une réelle touche personnelle qui fait le sel de ce premier roman. C'est une réelle découverte, dans laquelle les frontières de la raison sont toujours repoussées grâce notamment au fameux Géant de Brume, personnage incroyablement complexe, mais chut … On s'en voudrait de vous dévoiler la fin, tant l'intrigue est bien ficelée, et la résolution explosive. Un nouvel auteur à découvrir, à suivre, à dévorer, mais attention : vous n'en sortirez pas indemne.