Un coup de coeur de Géraldine
Deuxième surprise : deux sous-titres ! « Voix et histoires d’une banlieue populaire » au recto et « L’expérience d’un film » au verso.
Première question : par quelle face démarrer ?
Deuxième question : par quoi commencer, le livre ou le film ?
Réponse : laissez-vous surprendre !
J’ai commencé par le livre, face A : l’histoire de la banlieue populaire des Mureaux, la « cité Renault-Flins », construite pour y loger les ouvriers, d’abord locaux, puis issus de l’immigration (Europe du sud, Maghreb puis Afrique Subsaharienne), à l’époque où les grandes usines automobiles prospéraient.
Manon Ott retrace la vie de cette « banlieue populaire » depuis sa naissance, à partir de l’implantation de l’usine Renault-Flins et de la construction des premières barres d’immeubles. Synonymes de « confort moderne », ces nouveaux logements, équipés de toutes les commodités, étaient le symbole du progrès. La vie sociale du quartier y était florissante.
Le développement de l’usine oblige la Régie Renault à recruter plusieurs vagues de travailleurs immigrés, tout en construisant de nouveaux ensembles pour les loger. Le quartier se transforme.
Les conditions de travail à la chaine sont dures. La révolte s’organise progressivement. La cité des Mureaux devient alors la base arrière de l’organisation des luttes sociales des années 60.
Puis vint la désindustrialisation des années 70 et son lot de licenciements, première marche vers la paupérisation du quartier et la précarité des populations. La banlieue est désormais victime des regards stigmatisants, en proie aux images dégradantes diffusées par les médias.
La face B du livre retrace « l’expérience d’un film », qui complète cette brillante étude par des témoignages d’habitants. Manon Ott nous dévoile ici les coulisses de son œuvre, un film de 1h15 tourné en noir et blanc, majoritairement de nuit, moment intime où les confidences prennent place. Un film touchant, positif, qui donne la parole aux anciens qui ont vu naître Les Mureaux et aux jeunes qui ont grandi là. Loin des clichés et du discours victimisant, ces « personnages » nous plongent dans leur quotidien, avec objectivité, sincérité et bienveillance.
Le film donne envie de lire ou relire cette face B, étayée de nombreuses photos en noir et blanc. On y plonge alors comme dans un album souvenir. Voir le film en amont décuple le plaisir d’en savoir plus, de retrouver ces « personnages », de les (re)découvrir.
Une étude riche, une enquête passionnante, un travail magistral.