Un coup de coeur de Libraires
Ce temps particulier et inédit du confinement que nous vivons semble plus que propice à la lecture de correspondances. Les lectrices et les lecteurs y trouveront un écho souverain de proximité. La distance forcée entre les êtres chers, le repli imposé en soi-même, l’envie frénétique de partager, de se raconter : toutes les conditions nécessaires aux échanges épistolaires sont réunies. Même si, aujourd’hui, la plupart de ces échanges se font via internet, le plaisir de lire ou feuilleter des correspondances est réellement d’actualité.
Un ouvrage de la collection « Folio Histoire » inédit rassemble une sélection des lettres échangées entre Alfred Dreyfus et sa femme Lucie sur la période de sa détention (1894-1899)°dont certaines n’avaient jamais été publiées.
Rappelons simplement que le capitaine Dreyfus est accusé à tort de crime de haute-trahison en 1894 et condamné à la déportation à vie et à la dégradation en place publique. Il sera innocenté et réhabilité de longues années après cette condamnation. L’affaire Dreyfus fut non seulement une erreur judiciaire mais aussi une des plus graves crises politique de la IIIe République.
Les lettres que nous pouvons lire ici sont d’ordre intime : ce sont de très belles lettres d’amour. Les sentiments que se portent les deux époux affleurent même si la censure les à ajuster leur prose. S’il leur est également interdit de faire part de toute information sur le dossier judiciaire, ce sont quand même des lettres de combat. Le fil de l’écriture se fait ici résistance contre une injustice. Il devient un moyen de lutter en plus d’être un moyen de s’exprimer. Ces lettres rendent aussi justice à Lucie, grande oubliée de cette affaire, qui n’a jamais cessé de se battre pour la libération de son mari et qui a tenu un rôle essentiel dans celle-ci.
Riche d’un appareil critique et historique, ces lettres nous émeuvent, nous interpellent et nous rappellent la puissance de l’écriture : « écrire, c’est résister »