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Un coup de coeur de Mollat
Jérôme Savonarole, l’énigmatique moine italien né à Ferrare en 1452, a laissé derrière lui une postérité largement controversée. A t-il été un prophète inspiré, un tyran borné, un hérétique révolutionnaire ou un mystique éclairé ?
Marie Viallon, dans cette biographie très documentée, nous montre que le prédicateur dominicain était tout cela à la fois. Mais qu’il était avant tout un homme de son temps. En pleine Renaissance artistique, dans le contexte du renversement des Médicis par les troupes françaises de Charles VII et l’installation des Borgias au Vatican, Savonarole part seul en croisade contre les excès de vices et de débauche dont sont coupables, selon lui, la plupart de ses contemporains. De 1494 à 1498, il instaure en plein cœur de la ville de Florence une dictature théocratique, calquée sur l’idéal chrétien d’un royaume de Dieu sur terre. Ses «bûchers des vanités», qu’il allume à travers la ville, condamnent par le feu livres, poèmes, jeux, tableaux ou nus, dont ceux du jeune peintre Botticelli, jugés obscènes. Par ailleurs, il modifie le système d’imposition, oblige les riches à verser l’aumône pour les pauvres et prône l’abolition de la torture. Humaniste visionnaire ou despote, quoi qu’il en soit, Savonarole dérange. Son ennemi juré, le licencieux et décadent pape Alexandre VI l’excommuniera et l’enverra au bûcher 1498.
Au delà de l’intérêt documentaire de la biographie, précise et rigoureuse dans sa narration, l’auteur nous offre un accès direct aux homélies et aux sermons du prédicateur, archives aussi rares que précieuses pour se faire une idée plus précise d’un personnage trop souvent réduit à des caricatures. 20 ans avant la publication des thèses de Luther, Savonarole reste dans tous les cas un précurseur de l’esprit des réformes à venir.