Contributeur(s) :
Traducteur : Juliette Aubert-Affholder
Un coup de coeur de
Lucie
Nie mehr Nacht : trois mots, trois syllabes, une belle allitération qui font déjà résonner la poésie même à l'oreille d'un non-germanophone. La traduction en français par Juliette Aubert-Affholde retranscrit cette délicatesse dans la langue de Molière.
Markus, un dessinateur quarantenaire, doit vivre et composer depuis quelques mois avec le décès de sa très-aimée soeur Ira, qui s'est ôtée la vie dans le garage de leurs parents. Elle laisse derrière elle son fils adolescent, Jesse. Lorsqu'on lui propose de passer quelques semaines en Normandie pour illustrer un reportage sur les ponts du Débarquement, Markus emmène Jesse avec lui dans l'espoir, sans doute, de renouer un lien plus étroit avec le garçon - déjà presque un homme - et de parler avec lui de sa mère. Mais c'est en fait la fuite en avant qui le porte : fuir Hambourg, ses parents, la douleur, la culpabilité. Car Markus porte en lui un secret (qui ne sera révélé qu'à la toute fin du roman), un secret inavouable, qui le fera plonger dans des abysses bien plus sombres et profondes que ce à quoi il s'attendait. Mais c'est bien connu : quand on arrive au fond de soi, dépouillé, on n'a guère le choix que de remonter vers la lumière ... pour qu'enfin il ne fasse plus jamais nuit.
En dehors de son indéniable qualité narrative, ce texte est véritablement empreint de beauté : dans sa solitude, Markus habite des lieux qui sont sublimés par le souvenir (et la plume de Mirko Bonné) : un hôtel perdu au milieu de nulle part, des dunes froides envahies d'oiseaux, une ferraillerie antédiluvienne, un ferry bon pour la casse... On ressort troublé de cet univers fait de paysages bruts. Encore une fois, les éditions du Typhon nous offrent un texte qui touche au sublime, dans un objet d'une élégance soignée. Un vrai coup de coeur.