Un coup de coeur de Anthony G.
À partir de ce drame terrible, le journaliste Chris de Stoop enquête sur les situations sociales et familiales des uns et des autres et tente de disséquer le mal. Se faisant, il cartographie un territoire oublié, quelque part entre Roubaix et la Belgique, où les choix professionnels semblent se limiter à : élever de la viande, abattre de la viande, vendre de la viande, travailler à l’usine ou rester au chômage. Cette donnée socio-économique couplée à l’abdication parentale, à la consommation de drogues et à l’effet de groupe produisent les effets délétères bien identifiées par les sociologues. Pour autant, il demeure difficile, pour l’auteur et pour le lecteur, d’expliquer le manque total d’empathie des criminels, leur acharnement gratuit et leur plaisir à filmer et diffuser leurs actes. Ainsi, Chris de Stoop laisse en suspens la dérangeante et entêtante question de la déshumanisation.
Perçu comme un « distributeur sur pattes » par ses meurtriers et comme un simple ermite par le voisinage, Daniel était, avant tout, un homme simple et généreux. Du reste, c’est le portrait qu’en dresse son neveu Chris, dans des pages sensibles et émouvantes. Par delà la restitution des faits, Le Livre de Daniel entend réhabiliter la mémoire d’un laissé-pour-compte, mettre un visage sur un de ceux qu’on ne regarde plus et raconter l'histoire d'une vie silencieuse. « Est-ce interdit de se soustraire à la vie sociale ? Pourquoi faudrait-il se soucier de tout ce qui se passe dans le monde ? »
Derrière ces questions, Chris de Stoop semble dénoncer une cruelle réalité : l'impossible cohabitation entre le monde de l'argent, du consumérisme et des réseaux sociaux et celui de la terre, de la paysannerie et de la rusticité.
Un livre tantôt révoltant tantôt émouvant dont on ne sort pas indemne.