L'association Jeunesses poétiques a été créée à Bruxelles en 1962 par M. Dorsel, l'initiatrice du Théâtre-poème. Elle intervient depuis cette date dans les établissements scolaires pour familiariser les jeunes au théâtre et à la poésie. Présentation de chacune des productions de la compagnie jusqu'en 1983. ©Electre 2024

D'abord, la singularité. Des Jeunesses Poétiques similaires ou sur le modèle de celles auxquelles Monique Dorsel donna leur élan il y a de cela quarante ans, il n'en existe pas ailleurs. C'est un prototype qui n'aurait pas eu de déclinaison, un modèle de haute couture qui n'aurait jamais débouché sur le prêt-à-porter. Parce qu'elles sont inimitables. Voilà donc un mouvement de jeunesse qui n'aurait pas dérapé dans la vulgarisation et le didactisme. Qui aurait d'emblée traité les jeunes à hauteur d'hommes et de femmes...

Aux Jeunesses Poétiques, on entrait de plain-pied dans le vif du sujet. Sans y mettre de formes, sans se draper dans sa solennelle superbe littéraire, dont j'avais déjà repéré quelques signes ailleurs, assez dissuasifs faut-il le dire. Chez Dorsel, on respirait une littérature forte, exigeante, révélatrice. Il n'y avait pas place, dans son orbite, pour la complaisance provinciale qui sévissait en d'autres officines, on prenait résolument le large, à bord d'œuvres faites pour défier toutes les épreuves. Et avec des moyens sains, naturels, francs et compétents : ici, on ne traitait pas les lettres à la légère, on se fondait sur leurs enjeux les plus risqués, et l'on fonçait toujours plus loin.

J'ai beaucoup bourlingué depuis, mais au fond de moi, je sais que je n'ai jamais dévié. Et cet engagement-là, c'est aux JP qu'il a été pris. Par moi et par tant d'autres, dont les noms sont rassemblés dans ces pages. Ils représentent des générations entières de praticiens et de spectateurs qui ont modifié, au départ de cette place forte, leur vision de la littérature et du théâtre en profondeur. Et puis la littérature et le théâtre tout court.

Jacques De Decker

La presse n'évoque jamais le travail minutieux, quotidien et inlassable de la pénétration de la littérature parmi les jeunes opéré par «Les Jeunesses Poétiques.» On ignore généralement que les comédiens qu'on voit jouer le soir au Théâtre-Poème ont parfois joué le matin un autre spectacle dans un établissement scolaire... Cette activité spécifique, pour laquelle des spectacles sont créés dans l'optique des jeunes spectateurs, est inconnue de la presse et du public, c'est pourquoi ce premier volume d'archives des Jeunesses Poétiques porte le titre de : Les JP, la Face cachée du Théâtre-Poème.