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Comme les amours

Auteur : Javier Marias


Un coup de coeur de Mollat

Certains titres résistent magnifiquement à toute traduction et on imagine ce par quoi Anne-Marie Geninet, l'excellente traductrice du prochain roman de Javier Marias, a dû passer pour rendre quelque chose de l'esprit de celui, simple en apparence, choisi par le grand auteur espagnol.

Car Los Enamoramientos devenu Comme les amours pourrait bien être aussi lui-même la traduction d'une formulation française tant ce livre est imprégné de notre littérature, ce qui n'étonne guère quand on connaît l'érudition de celui qui, depuis Ce que dit la majordome paru aux éditions Rivages de la grande époque, nous éblouit par son intelligence qui se joue des frontières et des langues. Travail d'orfèvre que cette traduction d'un livre qui érige le monologue en sciences exactes, c'est-à-dire en enchevêtrement d'hypothèses dont on sort étourdi.

Une personne parle avant tout, qu'on pourrait presque qualifier de personnage mineur de l'intrigue tant elle sait s'amoindrir mais pourtant c'est sa voix, la singularité de sa recherche de la vérité, la sienne comme celle qu'elle tente de percer, qui nous étreignent. Maria Dolz, que nous allons écouter pendant 400 pages exaltantes de finesse, travaille dans l'édition où elle subit toute la journée les névroses d'écrivains qui sont d'autant plus acharnés dans leurs exigences qu'ils sont médiocres : elle a fort à faire notamment avec un faiseur de la pire espèce qui vit sur l'idée qu'il a imposée qu'il était programmé pour le Nobel (ce qui nous vaut des pages saignantes sur ces grands malades que peuvent devenir les écrivains). Son rare moment de détente dans une journée qu'elle sait à l'avance semée de tâches éreintantes est celui qu'elle passe attablée à l'heure du café matinal, à quelques mètres d'un couple qui la fascine tant il traduit un sentiment d'harmonie qu'on cherche chez ceux qui vivent une longue histoire. Elle ne sait presque rien d'eux et hésite même sur le nom du Monsieur, Devern ou Desvern, un homme raffiné et élégant, à la limite de la sophistication, et dont elle croit comprendre qu'il est producteur de cinéma. Ne les connaissant pas, il lui faut un peu de temps pour s'expliquer leur disparition de la terrasse. Elle apprend enfin et reconstitue peu à peu l'horrible fait divers qui a conduit à l'assassinat en pleine rue à coups de couteaux et par un dément de ce Devern. Il va falloir ce drame pour briser la glace entre les femmes, l'éditrice osant surmonter sa discrétion en se faisant connaître de la veuve, Luisa Alday, qu'elle découvre détruite, incapable de surmonter l'épreuve mais qui la reconnaît, l'ayant surnommée « la jeune prudente ». Maria Dolz, qui applique à la vie ce que la littérature lui a enseigné, va explorer ce nouvel univers qui s'offre à sa sagacité et sa curiosité : ce que cachent les apparences, ce que dissimulent les bonnes et les pires intentions, les mobiles des amis qui peuvent masquer des âmes de tueur. Elle fait la connaissance impromptue du meilleur ami du défunt, un homme à femme qui l'a séduit sans rien lui promettre mais dont elle va surprendre le secret, car il semblerait qu'il ne soit pas étranger à cette mort brutale. On s'avisera bien de ne pas raconter ce qui fait un des charmes de ce livre qui parle beaucoup d'autres livres et qui se sert d'auteurs classiques pour comprendre ce que notre présent contient de permanent (avec des pages éblouissantes sur Balzac notamment ou MacBeth où la seule analyse d'un verbe peut occuper de précieuses et lumineuses lignes).

Profus, bavard, tournoyant, avec des rebondissements qui viennent pimenter un roman qu'on croyait plus analytique que dramatique, Comme les amours est un livre qui déclenche facilement l'hyperbole, un roman qui en appelle à notre intelligence, un jeu ébouriffant avec les spectres et le destin. C'est sans aucun doute un des grands romans de cette rentrée.
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Résumé

A son retour de vacances Maria Doltz, éditrice madrilène, constate avec déception l'absence, à la terrasse du café où elle a ses habitudes, d'un couple dont le bonheur communicatif égayait son petit déjeuner. Elle apprend avec horreur que le mari a été assassiné. Elle se rapproche de Luisa, la veuve, et découvre les liens ambigus que cette dernière entretient avec le meilleur ami du défunt. ©Electre 2024

Comme les amours

Chaque matin, dans le café où elle prend son petit déjeuner, l'éditrice madrilène María Dolz observe un couple qui, par sa complicité et sa gaieté, irradie d'un tel bonheur qu'elle attend avec impatience, jour après jour, le moment d'assister en secret à ce spectacle rare et réconfortant.

Or, l'été passe et, à la rentrée suivante, le couple n'est plus là. María apprend alors qu'un malheur est arrivé. Le mari, Miguel Desvern, riche héritier d'une compagnie de production cinématographique, a été sauvagement assassiné dans la rue par un déséquilibré. Très émue, elle décide de sortir de son anonymat et d'entrer en contact avec sa femme, Luisa, qui est devenue un être fragile, comme anesthésié par la tragédie. Dans l'entourage de Luisa, María rencontre Javier Díaz-Varela, le meilleur ami de Miguel, et elle comprend vite que les liens que cet homme tisse avec la jeune veuve ne sont pas sans ambiguïté. Bien au contraire : cette relation jette une ombre troublante sur le passé du couple, sur la disparition de Miguel, sur l'avenir de Luisa et même sur celui de María.

Servie par une prose magistrale, habile à sonder les profondeurs de l'âme humaine mais aussi à tenir son lecteur en haleine, cette fable morale sur l'amour et la mort ne peut que nous rappeler, par son intensité, les meilleures pages d'Un coeur si blanc ou de Demain dans la bataille pense à moi. Comme par le passé, Javier Marías y dialogue avec les tragédies de Shakespeare mais également avec Le Colonel Chabert de Balzac dont il nous offre ici une lecture brillante, complètement inattendue et strictement contemporaine.

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Fiche Technique

Paru le : 22/08/2013

Thématique : Littérature Espagnole et Latino-américaine

Auteur(s) : Auteur : Javier Marias

Éditeur(s) : Gallimard

Collection(s) : Du monde entier

Contributeur(s) : Traducteur : Anne-Marie Geninet

Série(s) : Non précisé.

ISBN : 978-2-07-013873-9

EAN13 : 9782070138739

Reliure : Broché sous jaquette

Pages : 372

Hauteur: 21.0 cm / Largeur 14.0 cm


Épaisseur: 2.7 cm

Poids: 403 g