Un coup de coeur de Mollat
Du coup, quelle joie de le voir débarquer en poche ! Alors pour ceux qui ne le connaissent pas encore, faisons les présentations. Cornebique est un bouc heureux au pays des boucs, il joue de la mandoline avec son meilleur ami Bique-en-Borne, travaille aux champs l'été et s'explose la panse à coups de soupe aux choux l'hiver. Son seul souci c'est qu'il n'a toujours pas réussi à avouer son amour à Cornebiquette (avec un nom pareil, ils sont prédestinés, c'est sûr !). C'est simple quand elle est dans les parages, ses cornes s'emmêlent avec son bouc et il ne peut plus dire un mot. Alors imaginez sa cruelle déception lorsqu'elle lui avoue son amour… pour Bique-en –Borne. C'en est trop pour notre bouc, il ne peut pas faire face et décide de prendre la tangente. Il part, il ne sait pas où mais il s'élance et lorsqu'on lui demande où il va, il répond qu'il va « faire un tour ». Tour qui soit dit en passant durera plus de quatre ans.
La tentation est grande de vous en dire plus mais ce serait gâcher votre plaisir. On vous dira juste qu'il va rencontrer un loir bailleur, un coq bonimenteur (et Alzheimer), des fouines griffues, participer à des concours d'insultes et à des courses particulièrement risquées, le tout sur ses airs de banjo.
Et il va bien grandir notre petit bouc pendant ces quatre années… On l'aura compris, La ballade de Cornebique, est un voyage initiatique tout en finesse qui illustre parfaitement le passage de l'enfance au monde adulte. Sous ses airs goguenards, Cornebique va faire de grandes rencontres et prendre de gros risques pour eux. Les grands espaces lui permettent de faire le point et de comprendre que tout n'est pas toujours blanc ou noir…
Si la thématique est classique c'est l'écriture de Mourlevat qui fait toute la différence. La première phrase donne le ton, une sorte de parler bouc, difficilement imaginable je vous l'accorde mais tout à fait remarquable. On s'émeut beaucoup de cette histoire mais surtout qu'est-ce qu'on rit ! Et on rit vraiment, de ces éclats de rire qui fusent et qui reviennent aussitôt qu'on y repense.
Imaginez un coq qui brandit une fouine à bout de bras en demandant à ses congénères si ce qu'il tient est une part de boudin. Et bien c'est tout l'esprit de Cornebique.