Un coup de coeur de Mollat
Amours en marge, bien qu'il ne paraisse qu'aujourd'hui, est le premier long roman de Yoko Ogawa, Et oui ! Quand je dis "long", je ne suis peut être pas très claire. Pour tout vous dire, Yoko Ogawa est un peu la reine interplanétaire - c'est très personnel - de la nouvelle et du roman court.
Et quel roman que ces Amours en marge ! Tous les thèmes chers à l'auteur sont traités ici : la mémoire, la solitude et les collections.
Voici donc l'histoire relativement simple d'une jeune femme mariée qui se retrouve à l'hôpital pour des troubles auditifs. Elle entend un violon jouer de manière récurrente et tous les sons sont amplifiés et résonnent dans sa tête. Un jour, elle est interviewée au sujet de ses troubles dans un hôtel et son attention va se fixer jusqu'à l'obsession sur les doigts du jeune homme qui dactylographie la discussion ; à partir de là, la jeune femme va nouer une relation pour le moins étrange avec cet homme et ses doigts, une relation à la fois douce, fétichiste et thérapeutique. Dans cette histoire, l'auteur porte une attention particulière aux différents sens et surtout aux bruits et aux silences, et l'on se rend compte à quel point on peut ne plus faire attention à des sons familiers, comme le bruit du tire-bouchon sur une bouteille de vin ou le son d'un stylo grattant le papier.
Ce qui trouble dans l'écriture de Yoko Ogawa, c'est la précision chirurgicale de ses mots et de son style. Un simple détail, une image ou un objet anodin prennent subitement une ampleur inattendue et sa technique de zoom fonctionne à la perfection. Elle met toujours en place des histoires à la fois simples et étranges, campant des personnages banals et situe souvent son action à la frontière d'une atmosphère fantastique subtile.
Continue comme ça Yoko ! Tu es admirable !