Partant du constat que la société de son temps se trouve de plus en plus gagnée par le positivisme et l'athéisme, face auxquels le nationalisme exacerbé de l'Eglise constitue une réponse inadaptée, V. Soloviev (1853-1900) entend revenir au message biblique original, délivrer la foi des particularismes locaux et reconstituer de façon raisonnée l'ensemble des destinées théocratiques de l'humanité. ©Electre 2024

A la fin du XIX^e siècle, un jeune philosophe russe, Vladmir Soloviev, déjà connu pour ses écrits sur les questions religieuses et politiques, décide de donner à son cinquième ouvrage - qui restera comme l'un des plus élaborés - un titre provocateur : Histoire et avenir de la théocratie.

Partant du constat que la société contemporaine se trouve de plus en plus gagnée par le positivisme et l'athéisme, face auxquels le nationalisme exacerbé de l'Église constitue selon lui une réponse tout aussi inadaptée aux mutations de l'époque, Soloviev entend proposer une alternative en démontrant que cet état de fait résulte a minima d'une méconnaissance du message biblique original, voire de dérives dans son interprétation.

Pour appuyer sa thèse, Soloviev pressent qu'il lui faut partir des origines en composant une synthèse de l'histoire philosophique et religieuse de l'humanité qui, depuis l'Ancien Testament et l'apport du peuple juif à la chrétienté, soulignerait de façon rationnelle la nécessité d'une unité entre vie spirituelle et vie matérielle et, partant, établirait la permanence de l'amour de Dieu pour l'homme considéré dans son unité et sa totalité.

En ce sens, l'introduction de la Théocratie s'avère des plus claires : « Justifier la foi de nos pères, en l'élevant à un nouveau degré de la conscience rationnelle ; montrer que cette antique foi, délivrée des chaînes du particularisme local et de l'égoïsme national, coïncide avec la vérité éternelle et universelle, tel est le dessein majeur de mon travail (...). Afin que cette résolution ne soit, ni arbitraire, ni superficielle, il fallait lui donner une large assise en reconstituant de façon raisonnée l'ensemble des destinées théocratiques de l'humanité, telles qu'elles sont révélées dans la parole de Dieu et dans l'histoire de l'Église chrétienne. Le contenu du premier tome ici publié aurait pu s'appeler Philosophie de l'histoire biblique ».

Poursuivi par la censure, qui voit dans l'oeuvre de Soloviev une contestation du pouvoir de l'Église, l'auteur fera finalement paraître la Théocratie en Autriche.

La présente édition de la Théocratie, pour la première fois traduite en français, nous aide donc à relire la Bible avec un regard neuf, en nous plaçant à la fois au centre de la révélation mais aussi face à une véritable profession de foi chrétienne tout à fait conforme à la théologie traditionnelle de notre temps.