Un coup de coeur de Mollat
L'objet de son nouveau livre touche ici à l'intimité et en particulier celle du couple.
Au XIXe, ce qui se passe entre les époux doit, y rester ; les murs, les voisins, la police, pour tous, le silence est de mise. Il est alors difficile pour les juristes d'intervenir lorsque des histoires de violences conjugales apparaissent parmi leurs dossiers. Mais à force de persévérance, les affaires se font de plus en plus connaître. La parole se libère par la rumeur, une lettre de dénonciation, les témoignages directs puis ceux des victimes elles-mêmes.
Le travail des magistrats et juristes est sensible, ils avancent à tâtons, précautionneusement. En effet, comment faire basculer ces violences liées au droit civil (le mariage) au droit pénal, autorisant ainsi à juger et condamner les coupables ?
Les obstacles sont multiples, à commencer par les victimes elles-mêmes. Entre devoir et peur, souvent elles se rétractent ou insistent pour qu'il n'y ait pas de sanction. Mais les hommes de loi insistent, chaque affaire permettant d'avancer et de créer au fil du temps un système pénal général. Le « droit de correction » perd de sa légitimité, la société est de plus en plus choquée par ces abus de violences et la fin du « siècle des Codes » voit davantage les interrogatoires se répandre que l'annulation d'une plainte.
C'est véritablement l'obstination des magistrats à vouloir juger et punir les agresseurs qui permit de défendre de mieux en mieux les victimes. En recourant à la médecine avec le développement des analyses post-mortem, en passant par la reconstitution des faits et à la prise en compte des événements passés, c'est toute une hiérarchisation, fine et précise, des informations qui s'instaure.
Écrire sur les violences conjugales, c'est montrer l'évolution de nos structures sociales depuis deux cent ans, les valeurs d'égalité (entre époux, devant la loi) et l'émancipation des femmes (majoritairement victimes). Ce texte souligne également combien le droit est essentiel pour bâtir et structurer une société, combien il permet le vivre ensemble.
Vous apprendrez sans nul doute beaucoup de choses à la lecture de ce livre, dont il faut évoquer la beauté en tant qu'objet.
Publié chez la toute nouvelle maison d'édition de sciences humaines, Anamosa, laissez-vous séduire par cette maquette astucieuse et novatrice (pas besoin de marque page, il est incorporé au livre), la qualité du papier, de la présentation. Plaisir et confort sont au rendez-vous pour vous procurer une véritable expérience de lecture, sur le fonds comme sur la forme.
Une réflexion inédite et brillante qui piquera votre curiosité !