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Lydie Salvayre - Autoportrait à l'encre noire

L'autoportrait littéraire : l'écriture comme un acte de résistance et de sincérité excessive.
Publié le 14/10/2025
Lydie Salvayre vous présente son ouvrage "Autoportrait à l'encre noire" aux éditions Robert Laffont. Entretien avec Sylvie Hazebroucq. Rentrée littéraire automne 2025.
Dans Autoportrait à l'encre noire, Lydie Salvayre se livre à un exercice périlleux : celui de l'autoportrait. Elle confie d'emblée sa perplexité face à la commande, une proposition qui l'a poussée hors de sa zone de confort, mais qu'elle a acceptée en se référant à la philosophie de Michel Leiris, qui considère l'écriture comme une tauromachie, un art du risque. Cet autoportrait s’inscrit dans une "sincérité excessive", une règle qu'elle s'est imposée pour éviter le narcissisme et l'autocomplaisance.

L'autrice explore le thème du pardon à travers le prisme de sa relation complexe avec son père, un réfugié politique espagnol au caractère colérique, qu'elle a longtemps détesté. Elle révèle que l'écriture lui a permis de revisiter cette figure paternelle, de la comprendre non plus comme un homme volontairement méchant, mais comme une victime de l'exil et de la mélancolie. Ce nouveau regard sur son père a, en retour, ébranlé les convictions politiques qui la confortaient dans une lutte contre "les méchants".

Lydie Salvayre aborde la notion de servitude volontaire qu'elle rapproche de l'addiction aux réseaux sociaux, un thème qu'elle a longuement médité à la lecture du Discours de la servitude volontaire de La Boétie. Elle s'interroge sur ce qui pousse les individus à se soumettre, une réflexion qui fait écho à sa propre détestation de l'embrigadement militant, une posture qu'elle a développée par réaction à son père. L'écriture devient alors une forme de résistance, un moyen de se distancier du prêt-à-penser et de la "langue commune".

L'autrice entremêle son parcours personnel et ses réflexions sur la littérature. Elle évoque son attachement à la "langue de l'entre-deux" qu'elle a forgée entre le français académique appris à l'école et le "fragnol" de sa famille. Elle défend une littérature qui navigue entre le classique et le prosaïque, l'intellectuel et le vulgaire, une approche qu'elle incarne par ses écrits. Elle explique comment sa vocation littéraire est née d'un professeur de français qui a su déceler son talent et sa soif d'apprendre.

L'entretien se conclut sur une note plus intime, avec des anecdotes sur son enfance, sa passion pour la lecture et ses victoires au concours de twist. Elle explique également le choix du sous-titre "à l'encre noire", une couleur qui, loin d'être funeste, symbolise l'humour, la colère, l'engagement et la profondeur. Tout au long de la discussion, Lydie Salvayre se montre à la fois pudique et impudique, s'efforçant de maintenir une distance nécessaire pour éviter l'exhibitionnisme tout en se livrant sans concession.
Bibliographie