Un coup de coeur de Mollat
Il est des petits textes "coup de poing"sur lesquels on tombe par un heureux hasard, sûr d'avoir mis la main sur une perle, fier et surpris d'être découvreur, sentiment terni par l'idée que d'autres nous échapperont.
L'auteur est une jeune femme aux origines singulières - elle écrit en français, son père est hongrois et sa mère est norvégienne - son écriture est syncopée, des phrases courtes qui claquent, une économie de mots qui laisse le lecteur au plus près du récit, ébloui par tant de talent et de maturité.
L'histoire se déroule dans un petit village à l'extrémité nord de la Hongrie bordé par une rivière inquiétante où l'on pratique la magie noire depuis des siècles, et qui sert de dérisoire frontière avec la Slovaquie.
Car, dès les premières phrases, l'auteur dénonce la partition de la Hongrie, le sentiment d'infériorité de ces ex-républiques soviétiques oubliées de l'Occident, le traumatisme de populations entières malmenées par l'histoire et ses décisions arbitraires.
Klara travaille comme aide soignante dans un hopital où des parents désoeuvrés abandonnent leurs enfants handicapés, petits êtres aux corps déglingués dont la société ne sait que faire.
Soigner, toucher, caresser, regarder, c'est de là que viendra le salut. Celle qui ne croyait plus son "coeur capable" va revenir à la vie avec douceur et émerveillement.
C'est une miniature parfaite, il y a tant à extraire de ces quelques pages que l'on lit d'un jet et sur lesquelles on se doit de revenir, car la relecture , le choc passé, est une nécessité.