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Les Bienveillantes bienvenues.

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Publié le 27/10/2006
Le Grand Prix du roman de l'Académie française a été attribué à Jonathan Littell pour Les Bienveillantes, paru aux éditions Gallimard.

L'aura, l'aura pas ?

C'est depuis plusieurs semaines la question qui taraude tous les forcenés du pronostic « littéraro-automnal ». C'est traditionnellement l'Académie française qui entame la saison des prix avec son Grand Prix du roman et le destin de beaucoup de « primables » se joue là.

Voici donc advenu le couronnement tant annoncé des Bienveillantes de Jonathan Littell, le livre évènement de cette rentrée littéraire qui a propulsé sur le devant de la scène un jeune écrivain qui signait là sa première œuvre.

Jonathan Littel est le fils de Robert Littell, écrivain notoire de bons romans d'espionnage et signataire lui aussi d'un bon coup d'édition, La Compagnie, qui fut l'une des heureuses surprises de l'été 2003.

Le fils de son père a pour sa part entrepris un travail de grande envergure en traçant l'histoire et le portrait d'un acteur du génocide juif durant la seconde guerre mondiale. Cet impressionnant pavé de quelques 900 pages, accompagné d'un glossaire expliquant les termes militaires allemands qui sont livrés en langue originale, relate donc, de Berlin à Berlin quatre années de la vie d'un bourreau ordinaire, partagé entre dégoût, zèle et résignation. Dans une langue blanche et froide tempérée parfois de maladroites tentatives lyriques – mais c'est le héros et narrateur qui écrit – est ainsi décrit le quotidien d'un assassin de masse.

L'ouvrage, vous le savez, a fait grand bruit à sa parution, par sa froideur et la distance avec laquelle est traité le thème. En laissant en suspens toutes questions morales, en refusant toute empathie, Jonathan Littell a laissé un vide qu'il fallait combler à tout prix. La mutité de l'auteur, qui refuse toute apparition télévisée, n'a fait qu'encourager les divers commentateurs - du meilleur, Claude Lanzmann, aux pires - à interroger cette masse littéraire pour en extraire un message.

Parallèlement, rumeurs et on-dit on commencé à bruisser, dans la presse et la blogosphère, dans les couloirs et les librairies pour pourfendre un livre qui ne serait qu'un coup marketing savamment orchestré par Gallimard avec l'aide de l'agent de Jonathan Littell, ce dernier ne devant qu'à son patronyme et sa filiation d'être publié sous la prestigieuse couverture ivoire. On gloussait aussi à propos des anglicismes qui auraient truffé le manuscrit original obligeant les correcteurs de la rue Sébastien-Bottin à des gros travaux de ravaudage.

Enfin et malgré tout on promettait tout les prix littéraires au jeune américain. Ce tapage et cette évidence étaient bien évidement un leurre puisque l'on sait – c'est statistique ! – que vos chances d'obtenir l'un des prix majeurs diminuent au fur et à mesure que votre côte monte chez les pronostiqueurs.

Hier s'est donc ouverte la saison des palmarès. Et là, encore, on commente. Le Grand Prix du roman de l'Académie française augure-t-il d'une razzia Littell ou s'annonce-t-il comme un prix de consolation ? Il est vrai que les jurés des différents prix ont à cœur de se distinguer les uns des autres et il est rare qu'un même ouvrage se voit orné de plusieurs couronnes. Mais qui sait, Goncourt, Fémina et Renaudot ont souvent su nous surprendre, alors pourquoi pas cette année.

Restent en lice :

Pour le prix Goncourt

Alain Fleischer, L'amant en culottes courtes, Seuil
Jonathan Littell, Les Bienveillantes, Editions Gallimard
Michel Schneider, Marilyn dernières séances, Grasset
François Vallejo, Ouest, Editions Viviane Hamy

Pour le prix Fémina

Françoise Henry, Le rêve de Martin, Grasset
Nancy Huston, Lignes de faille, Actes Sud
Jonathan Littell, Les Bienveillantes, Editions Gallimard
Laurent Mauvignier, Dans la foule, Minuit
Olivier & Patrick Poivre d'Arvor, Disparaître, Editions Gallimard
Michel Schneider, Marilyn dernières séances, Grasset

Pour le prix Renaudot

Christine Angot, Rendez-vous, Flammarion
Pierre Charras, Bonne nuit, doux prince, Mercure de France
Vénus Khoury-Ghata, La maison aux orties, Actes Sud
Jonathan Littell, Les Bienveillantes, Editions Gallimard
Alain Mabanckou, Mémoires de porc-épic, Seuil
Gabriel Matzneff, Voici venir le Fiancé, Editions de La Table Ronde
Olivier & Patrick Poivre d'Arvor, Disparaître, Editions Gallimard
Michel Schneider, Marilyn dernières séances, Grasset