William Styron est mort

Ce ne sera finalement pas un suicide, mais une bête pneumonie qui aura eu raison de l'un des derniers géants des lettres américaines du XXe siècle. Editorialement muet depuis une dizaine d'années, William Styron vivait à Martha's Vineyard, communauté chic du Massachussetts. Il y est mort.

L'œuvre de ce pessimiste est noire, fort noire. Sondant à chaque ouvrage un nouvel abîme : le pouvoir, la guerre, la Shoah, les luttes d'émancipation des noirs américains ; refusant tout manichéisme, il a su questionner en quelques livres - cinq romans, un recueil de nouvelles et le magistral Face aux ténèbres – tout ce que l'âme recèle de douleurs et de questions insolubles.

Il publie Un lit de ténèbres en 1951 et accède presqu'immédiatement à la reconnaissance de ses pairs. Mais c'est en 1967, avec Les confessions de Nat Turner , que vient la notoriété grâce au Prix Pulitzer qui lui est alors décerné. Le mini scandale qui suit fera aussi beaucoup pour la renommée : Les confessions… relate en effet la lutte d'un leader noir américain, plus fanatique qu'intègre. L'intelligentsia noire lui reproche ce héros ambigu.

Vient ensuite la célébrité mondiale avec Le Choix de Sophie. Ce best-seller sera adapté au cinéma avec Meryl Streep dans le rôle titre.

Son œuvre maîtresse est certainement la dernière : Face aux ténèbres .

Ce titre « conradien » ouvre un récit autobiographique dans lequel Styron relate son combat, sans cesse perdu, contre la dépression. Le gouffre s'est ouvert devant lui après qu'il a du renoncer à l'alcool, son corps le refusant désormais. Privé de toute échappatoire, condamné à faire face à son mal-être, Styron s'enfonce peu à peu dans la dépression. Face aux ténèbres est le récit de cette chute, dont il ne se relèvera jamais vraiment.

Face aux ténèbres, donc, William Styron a fermé les yeux…

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