Né en 1940, il fonde avec le peintre Raquel une petite maison d'édition, Orange Export LTD, qui de 1973 à 1986 publie la nouvelle génération de poètes dont il fait partie avec Claude Royet-Journoud, Jean Daive, Anne-Marie Albiach, Bernard Noël, ou encore Denis Roche, Pascal Quignard... Grand lecteur de la poésie américaine, il contribue à traduire et publier les "objectivistes" en anthologies et revues (Charles Reznikoff, George Oppen, Keith et Rosmarie Waldrop, Robert Duncan...) puis en créant en 1989 la collection "Un bureau sur l'Atlantique".
Au-delà de la littérature, c'est le mystère de la littéralité qu'il recherche, s'inscrivant notamment dans la lignée de "Témoignage" (Testimony) de Charles Reznikoff. Résolument moderne, sa vision de la poésie contemporaine mêle : formes minimalistes, montages, langage du quotidien, descriptions, notes, journaux, textes hétéroclites. La peinture, la photographie lui sont essentielles, tout comme la philosophie (Lucrèce, Nietzsche, Heidegger, Deleuze, sans oublier la révélation de Wittgenstein) ainsi que la "grammaire" cette "analyse critique du langage ordinaire" qu'il enseigne (Le Cours de Pise) et inscrit dans son œuvre (voir notamment ses cinq volumes d' Une grammaire de Tanger). Réinventant l'usage du vers, Emmanuel Hocquard revisite ses souvenirs, anecdotes, préférant "l'élégiaque inverse" à l'élégiaque classique, non sans un sens de l'humour telle son "Ode contre un rossignol" :
" N'appelez pas,
n'appelez pas cela chanter !
Toute la nuit
il a rugi sous ma fenêtre.
N'appelez pas le rossignol ! [...]
Je n'ai pas dormi. Je te hais.
Que tu te sois laissé prendre
au piège de la nature amoureuse,
passe encore.
Cela arrive tous les jours
à plus malin que toi.
Mais que tu sois devenu
cette figure emblématique
de l'amour en littérature,
voilà qui dépasse les bornes.
La rose qui,
dans ce domaine,
n'a rien à t'envier
en matière de sottise
est du moins silencieuse."
"Ode contre un rossignol" dans Un privé à Tanger