Nous sommes en 1944, après une courte d’année d’étude de dessin à l’école St-Luc de Bruxelles, André Franquin travaille comme animateur pour un petit studio répondant au nom de CBA. Ayant fermé ses portes en 1946, l’entreprise aura tout de même eu le privilège d’accueillir entre ses murs de grands noms de la bande dessinée tels que Peyo, Morris ou encore Eddy Paape. Et comme le hasard fait plutôt bien les choses, Morris (le père du cow-boy le plus rapide du far-west) présente le jeune Franquin au dessinateur Jijé alors en charge de la série Spirou et Fantasio pour le journal de Spirou. Après un essai fructueux, le bon Jijé cède le personnage à André Franquin. Mais ce dernier ne fait pas que reprendre le personnage, il développe un univers foisonnant autour du groom notamment en donnant plus de caractère à son ami en costume bleu Fantasio mais également en créant un lore riche comme avec l’apparition d’un animal à la fourure jaune et à la queue phénoménale avec le fameux marsupilami.
Le succès est au rendez-vous et au fur et à mesure des années se joindront à nos deux compères Spirou et Fantasio des personnages devenus emblématiques tels que le compte Pacôme de Champignac ou encore Zorglub.
La vie suit son cours mais un jour de 1955, Franquin entre en conflit avec les éditions Dupuis et accepte un contrat d’une durée de cinq ans avec les éditions Le Lombard. La prise de bec entre Dupuis et Franquin est d’ordre pécuniaire, l’auteur ayant vu ses revenus diminuer suite à un non-respect du nombre d'exemplaires tirés de son dernier album.
Les années au Lombard virent la création de la série Modeste et Pompon, série qui sera abandonnée par le créateur en 1959 mais qui sera reprise par Dino Attanasio. Il est également à noter que certains des récits des deux héros sont scénarisés par René Goscinny et Greg, cette collaboration permet à Franquin d’alléger sa charge de travail car, coup du destin, l’auteur est de retour au sein de la maison Dupuis.
Toujours pour pallier à cette surcharge de travail l’auteur, décide en 1957, de créer son propre atelier où divers artistes pourront l’accompagner dans l’accomplissement de ses différents projets.
C’est également durant l’année 1957 que Franquin eut l'idée de créer un personnage qui serait en quelque sorte son miroir en la personne de Gaston Lagaffe. De nature paresseuse, insoumis et farouchement opposé à la hiérarchie, Franquin se retrouve dans ce personnage qui est, dès ses origines, un employé de journal qui rythme l’ambiance morose de la rédaction grâce à des gags divers et variés.
Mais en 1961 André Franquin commence à avoir une mauvaise impression, celle que ces héros ne lui appartiennent pas vraiment et que les histoires sorties de son imaginaire commencent à tourner en rond. C’est ainsi que lentement il abandonne la série Spirou et Fantasio tout en livrant en 1963 et 1965 deux récits, l’un témoignant de son aversion pour l’univers militaire et le second se déroulant dans l’univers de Gaston Lagaffe.
Et à partir de 1968 la série Gaston devient la seule préoccupation de l’artiste belge.
En 1977, Franquin et ses compères mijotent quelque chose dans les sous-sols. L’idée d’un journal clandestin intégré aux pages de Spirou Magazine appelé Le trombone illustré. Dans ses pages s'illustrent des auteurs de renoms tels que Gotlib, Roba ou encore Rosinski. Ce supplément propose un genre de bande dessinée plus irrévérencieuse et plus orientée adulte que ce que le journal proposait jusqu’alors.
C’est dans ce même Trombone illustré que Franquin commence à mettre en dessin le début de sa série des “Idées noires”. Cette dernière permet à l’auteur de dénoncer les versants de la société qu’il a le plus en horreur comme les chasseurs, la religion ou encore les militaires.
Bien que le journal clandestin du Trombone soit terminé, André Franquin continuera tout de même la publication de ses idées noires dans le magazine Fluide Glacial.
En parallèle, la seule série sur laquelle l’artiste continu d'œuvrer, à savoir Gaston Lagaffe, gagne en maturité et propose des messages se rapportant aux causes défendues par Franquin. Tout cela jusqu’à ce qu’en 1982 une nouvelle dépression frappe l’auteur et aura pour cause une interruption totale de tous travaux jusqu’en 1984.
Le festival d'Angoulême de 1984 redonnera à André Franquin l’envie de poursuivre en réalisant de nouveaux dessins de Gaston Lagaffe mais également en repartant dessiner un des ses personnages mythique : le marsupilami. Accompagné au scénario par Greg, c’est durant la réalisation de ces nouveaux albums qu’il trouve son successeur en la personne de Batem.
Après un passage éclair par le dessin animé avec Les tifous, l’artiste belge abandonne son héros paresseux avec le dernier gag de Gaston en 1991.
Dernier gag, mais pas dernier album. En 1996 le quinzième volume des aventures de Gaston Lagaffe paraît et le succès est au rendez-vous.
Génie de la bande dessinée franco-belge, André Franquin aura eu un impact certain sur l’imaginaire collectif du neuvième art. Spirou et Fantasio, le Marsupilami, Gaston Lagaffe… Tous auront su émerveiller petits et grands et cela encore 25 ans plus tard.