Narration à la première personne, imaginant les sentiments et les émotions du général de Gaulle en mai 1968, alors qu'il s'oppose à une jeunesse dont tout le sépare et que les rangs de ses alliés s'éclaircissent au sein même de son gouvernement. L'auteur relate la rencontre à Baden-Baden de Charles de Gaulle et de Massu, et décrit un général déchiré entre l'orgueil et le découragement. ©Electre 2025

La fuite à Baden

Le 29 mai 1968, la France médusée apprend que, accompagné d'Yvonne et de Roger Tessier, son fidèle garde du corps, le président de la République, Charles de Gaulle, a quitté l'Élysée en hélicoptère pour une destination inconnue...

À Paris, les pavés volent et la situation est insurrectionnelle. Mobilisés par les étudiants, les ouvriers occupent les usines. Le pays tout entier est bloqué par les grèves, les transports sont paralysés. Le mot « révolution » est sur toutes les lèvres. Dans les sphères du pouvoir la confusion règne, et le Général enrage de ne plus pouvoir se faire obéir de ses ministres.

Sur ce moment décisif, nous savons presque tout. Il s'est rendu à Baden-Baden afin de rencontrer Massu, commandant en chef des Forces françaises d'Allemagne. L'on connaît aujourd'hui les décisions historiques qui en ont découlé. Mais que s'est-il réellement passé ?

« Massu regarda l'hélicoptère prendre de la hauteur. Au fond, il n'avait jamais compris de Gaulle. On le sentait tiraillé, déchiré, comme s'il était le jouet de forces opposées. Ce n'est pas qu'il n'aimât personne, qui décontenançait Massu, mais qu'il ne s'aimât point lui-même. On le devinait à mille petits riens, à des remarques en passant, des intonations, des propos cyniques ou désabusés qu'il lâchait sans trop y croire, mais qu'il lâchait quand même... Il suivait une ligne sans doute, mais en accomplissant tant de détours qu'on en perdait tout sens de l'orientation. De Gaulle était un roc sur du sable mouvant. »

Hervé Bentégeat, en historien et en romancier, sonde le coeur du vieil homme aux prises avec une époque qu'il ne comprend plus et avec les fantômes de son passé. Et le miracle de la fiction s'accomplit : c'est un de Gaulle de soixante-dix-sept ans, au crépuscule de sa vie et de son action politique, qui révèle ses pensées les plus secrètes. C'est l'homme qui se retourne sur sa vie, depuis ses débuts, privés comme publics.

Dans ce grand roman, la justesse psychologique s'appuie sur une documentation historique rigoureuse. Tout ce que de Gaulle a traversé est rapporté. Mais ce que l'on ignorait encore, c'est ce que Charles a vécu intimement. Le voici.