Des acteurs du patrimoine, historiens, archivistes et ethnologues, s'interrogent sur la notion de lieux de mémoire de P. Nora transposée sur les objets qui sont eux aussi porteur de témoignages. De la statue équestre de Napoléon à la bicoque de Clemenceau, ils rendent compte de ces oeuvres qui ont acquis une fonction mémorielle et qu'il faut conserver. ©Electre 2024

Regards sur les objets de la mémoire

Point n'est besoin d'insister sur la place importante que tient le passé dans notre société. Depuis les années 1970, notre conception du patrimoine s'est considérablement élargie, au point que Pierre Nora parle d'« emballement patrimonial ». On conserve, on protège aujourd'hui des biens matériels et immatériels, des mémoires, des espaces naturels, des objets exceptionnels et d'autres hier négligés. Un nouveau champ du patrimoine dédié à la mémoire est apparu sous l'ère des commémorations. Quelles pratiques, quelles analyses adopter vis-à-vis de ce champ patrimonial en ayant en tête les démarches historiques et celles purement mémorielles, qui parfois laissent place à la passion ?

Jean-Michel Leniaud voit « le droit à la mémoire comme l'un des fondements du droit à l'identité ». Dans la distinction entre l'objet qui transmet une mémoire, célèbre une identité, et celui qui ne fait que l'évoquer, l'acteur du patrimoine est-il seul juge ? Les objets mémoriels jouent le rôle d'intermédiaires entre le présent et le passé tout en témoignant de l'image qu'une société se fait de son passé.

Universitaires, ethnologues, archivistes, restaurateurs du patrimoine, conservateurs des monuments historiques et conservateurs des antiquités et objets d'art révèlent ici les derniers fruits de leurs recherches, de leurs découvertes et de leurs questionnements sur la relation particulière qui unit certains objets à la mémoire qui peut y être attachée, objets ou lieux qui nourrissent notre imaginaire et suscitent notre émotion.

Les interventions permettent de comprendre la manière dont peuvent dialoguer mémoire et patrimoine et de s'interroger sur la façon dont l'objet porte en lui une séquence historique qu'il remémore plus que l'intérêt esthétique qu'il révèle. Souvent ce sont des oeuvres qui portent en elles des tragédies, des douleurs... mais parfois aussi le souvenir des grands hommes.

Actes du colloque de l'Association des conservateurs des antiquités et objets d'art de France tenu à La Roche-sur-Yon du 1^er au 3 octobre 2015.