Un coup de coeur de Emilie S.
L'auteur, Gary Younge, journaliste britannique qui a été correspondant pour le Guardian à Washington de 2011 à 2015, porte dans son ouvrage un regard d'européen sur [...] l'aspect le plus difficile (pour lui) à comprendre pour la plupart des étrangers vivant ici [...] la culture nationale des armes à feux.(p. 17) C'est un pistolet trouvé dans un parc un jour qui déclenche chez lui une vraie prise de conscience "Je risquais ma propre peau et celle de ma famille – une peau noire à la merci d'une société qui ne mettait pas les chances de son côté". p. 18
En effet, il faut savoir qu'aux États-Unis, chaque jour, sept enfants en moyenne décèdent de blessures causées par des armes à feu.
A partir de cette statistique effroyablement froide, Gary Younge a donc décidé de prendre une journée au hasard - ce sera ici le 23 novembre 2013 - et de raconter le destin des 10 jeunes gens de 9 à 19 ans tués ce jour-là, parfois par accident parfois lors de règlements de comptes. Il choisit d’enquêter sur chaque enfant. Nous suivons donc le déroulé de ses recherches qui permettent de reconstituer la courte vie et la mort de ces victimes selon les informations qu'il a pu avoir (rapports police, famille, presse...) Autant de petites enquêtes détaillées qui redonne véritablement vie aux dix enfants sans jamais tomber dans le voyeurisme pleurnichard. Bien au contraire.
"Le présent ouvrage est la photographie d'une société qui rend ces morts possibles, et dotée qui est plus d'une culture politique visiblement incapable de créer un environnement dans lequel on tenterait de les éviter."
D'une écriture vibrante qui nous permet de nous immerger dans ces dix vies, ce livre nous invite aussi à réfléchir sur la société américaine.
Un grand essai brillamment raconté !