Un coup de coeur de Libraires BD/Manga
Fondateur du furyô, ce style à part entière de “slice of life” racontant la vie des racailles japonaises, Rokudenashi Blues est l'œuvre qui en a instauré les codes et qui l’a rendu populaire auprès du public japonais dans les années 90. On compte depuis nombre de personnages représentants ce genre, tous reconnaissables à leur franc-parler vulgaire, leur banane de rocker et leur uniforme de lycéen : Urameshi Yusuke de Yuyu Hakusho, Batte-man de One Punch man, Takamura Mamoru de Hajime no Ippo, Higashikata Josuke de Jojo’s Bizarre Adventure, sans parler évidemment du grand Eikichi Onizuka de Great Teacher Onizuka, qui a fait exploser à lui tout seul la popularité de son genre. Chacun est à sa manière un hommage à Rokudenashi Blue.
Toutefois, les traits de caractère rudes et exagérés de ces personnages ne sont en réalité bien souvent qu’une façade un peu abrupte, cachant de jeunes hommes aux grands cœurs, encore en train de se construire. Valeureux et volontaires, ils sont prêts à en découdre pour défendre leurs valeurs, prêts à être roués de coups pour protéger leurs amis ou leur bien-aimée.
Dans Rokudenashi Blues, Maeda Taison vient d’intégrer le lycée Teiken. Grâce, ou plutôt à cause de son immense force (proportionnelle à sa bêtise), il se retrouve très vite mêlé aux histoires de rivalités entre le club des boxeurs et le club des supporters. Il se serait pourtant bien passé de tous ces embêtements, lui qui a un rêve très simple : devenir champion du monde de boxe comme son idole Mike Tyson.
En fait, à l’inverse du shônen classique, le protagoniste de furyô n’évolue pas à proprement parler : il est déjà le plus fort physiquement, et est déjà animé par des passions et des idéaux qui lui sont propres. En revanche, ce dernier, délinquant presque malgré lui, transfert et sublime cette énergie dans de nouveaux objectifs : ici, le succès sportif (et on trouve pléthore de racailles devenues des génies du sport dans les manga, Eyeshield 21, Kuroko’s basket, Hajime no ippo, etc.), ou encore la réussite scolaire (cancres qu’ils sont de manière systématique, obtenir la moyenne est pour eux un véritable exploit). En somme, leur évolution est souvent plus complexe et plus mature, mais cela ne fait que rendre leur histoire plus fascinante ! Rokudenashi Blues en est la parfaite illustration !
Par ailleurs le talent inégalable du mangaka Morita Masanori nous laisse bouche bée devant des planches somptueuses au réalisme affolant. Les coups sont lourds, les visages expressifs, et les postures énergiques. Les dialogues sont hilarants et certaines scènes sont simplement à mourir de rire. En bref, Rokudenashi Blues est un de ces classiques encore trop méconnu, une pièce manquante dans le paysage manga Français, et cette sortie viendra sans aucun doute combler les plus anciens, comme les nouvelles générations de lecteurs !
Attention tout de même à ne pas trop vous attacher à ces brutes ou vous risquez d’en ressortir avec quelques bleus…