Un coup de coeur de Rayon Sciences Humaines
Rose Valland est une conservatrice de musée qui devient espionne et résistante durant l’Occupation. Elle tient un rôle majeur dans la restitution des biens culturels spoliés par les nazis. Dans son ouvrage Rose Valland : l’espionne à l'œuvre, Jennifer Lesieur y retrace sa vie. Plus qu’une biographie, ce récit se lit tel un roman nous montrant le destin d’une femme digne d’être connue de tous.
En 1940, le début de l’Occupation allemande entraîne de nombreux bouleversements en France et le milieu de l’art n’est pas épargné. Travaillant au Jeu de Paume, Rose assiste à l’arrivée de Goering, nommé numéro 2 du Reich, ainsi qu’à la spoliation des œuvres d’art de son musée. Discrète et invisible, elle devient alors une espionne et prend des notes de tous les vols commis par les nazis qu’elle transmet ensuite à Jacques Jaujard, directeur des Musées nationaux. Pendant 4 ans, elle subit une pression constante et fait face à la peur d'être démasquée.
En 1944, la guerre prend fin mais pour Rose rien n’est terminé. Des milliers d'œuvres sont à présent éparpillées à travers l’Europe, cachées ou abîmées, et doivent être retrouvées. Rose Valland en fait alors le but de sa vie. Face à la non-coopération de l’armée soviétique et à l’inefficacité des organisations administratives, elle reprend son costume d’espionne et se met à œuvrer dans l’ombre, parfois de manière illégale afin de retrouver ces biens culturels. La détermination de Rose Valland paie et permet la restitution de nombreux objets autant du côté allemand que du côté français.
Le récit de Jennifer Lesieur dresse le portrait d’une résistante de nature timide et discrète, une « invisibilité » qui l’aida à se cacher du regard des nazis pour devenir une femme reconnue, aussi courageuse que tenace. Cette biographie nous donne accès à sa vie privée, son affection pour ses proches, son amour pour l'art et son patriotisme sans faille. Grâce aux différentes sources, l'auteur nous offre une large bibliographie, accompagnée de ses recherches personnelles récoltées en marchant dans les pas de Rose Valland, ce qui lui a permis de mieux comprendre sa vie et sa personnalité.
Après la guerre, les années passent et le désir de retrouver ces collections pillées s'essouffle en Europe… Ce qui n’est pas le cas de notre « capitaine Beaux Arts » qui lutte jusqu’à son dernier souffle pour sauver ces oeuvres perdues. L’art étant considéré comme un milieu « d’hommes », il n’est pas surprenant de constater qu’on a si peu rendu hommage à une résistante pourtant si compétente, déterminée et même décorée ! Son acharnement permit la restitution de 60 000 œuvres d’art.
Un ouvrage captivant qui redonne à Rose Valland la place qu’elle mérite dans l’histoire.
Adéla Pasquiers