Un coup de coeur de Véronique M.
Certes les moyens de locomotion et de communication ont évolué, plusieurs villes ou pays ont disparu sous les eaux, l’Ecosse a adhéré de nouveau à l’Union européenne et se trouve à un tournant politique majeur avec les prochaines élections, mais dans ce “village au bout du loch Leven” (d’où le titre) où rien ne semble changer, l’immuable va côtoyer l’impensable vérité.
Dans ces paysages majestueux et isolés des Highlands relativement épargnés mais soumis au Grand Changement comme partout ailleurs, la découverte d’un corps encastré dans la glace va faire basculer la vie d’Addie, climatologue venue relever les données de sa station météo. Depuis dix ans qu’elle tient son père pour responsable du suicide de sa mère, Addie a rompu tout lien avec lui et a refait sa vie loin de Glasgow. Apprenant qu’un journaliste spécialisé dans les scandales politiques a été retrouvé mort près de Kinchlochleven, là où réside précisément sa fille, Cameron Brodie va tenter de reprendre contact avec elle et lui expliquer sa version de leur douloureuse histoire. Rien de plus facile pour l’inspecteur Brodie, mais rien de plus difficile pour ce père taiseux, solitaire, renfermé sur tous les secrets qui ont jalonné son existence. Quand son médecin lui annonce un cancer à un stade avancé, Brodie n’hésite plus et se lance dans cette quête insensée, à la fois perdue et vitale pour lui.
“Tempête sur Kinlochleven” est un roman atmosphérique, traduit par Ariane Bataille, qui vous serre le coeur à bien des égards, évite le pathos et réserve bien des surprises : un grand moment de lecture dans lequel Peter May réussit à nous faire ressentir, comme dans sa célèbre trilogie écossaise, toute l’épaisseur et la sensibilité des sentiments humains confrontés à la rudesse du climat.