Un coup de coeur de Véronique M.
“ tu salives de poésie. c’est goûtu, tu baves, ça dégouline”
A rebours des clichés, Hortense Raynal interroge la matière même de ce genre qu’elle n’hésite pas à qualifier de manière crue de joyeux “fumier” du corps et des sens.
Elle use d’une langue organique, charnelle, terreuse et fiévreuse pour en dire toutes les saveurs et les pulsations, sans langue de bois ni détours :
“ parfois faire un poème c’est comme faire les poubelles. ça schlingue la poésie en vrai ça sent, c’est pas neutre”
“ t’as une bouche-fumier montage de fumier bien odorant, et ton rôle, oui ton rôle, c’est de faire en sorte que personne se bouche le nez”
Dans la lignée de Ghérasim Luca ou de Christophe Tarkos, la poétesse et performeuse (ses textes se prêtent parfaitement à une mise en voix) fait swinguer et suinter le verbe. “Acrobate”, elle nous invite alors “à se contorsionner et faire se contorsionner les mots” pour explorer toutes les marges et faire jaillir une voix singulière et détonnante dans le paysage poétique actuel :
“la poésie : peur pas rassurante (...) le visage de la poétesse qui plonge dans le gouffre des mots, dans le sac de mots qui font peur. qui sont jamais utilisés. et son devoir c’est de les jeter à la face des autres ces pauvres petits mots pauvres petits, hideux, hideux. et si vous aussi pour une fois vous alliez dans le grand sac noir des mots ?”