De la boue sur les lèvres : récit

A 18 ans, Fabienne réalise son rêve et part passer un an aux Etats-Unis. L'enthousiasme et l'énergie qui l'animent lui font franchir tous les obstacles, notamment la barrière linguistique : elle se fait des amis et découvre le monde. Jusqu'au jour où l'impensable se produit : loin de ses proches, vulnérable, elle subit les abus sexuels de son hôte. Des années plus tard, ce drame resurgit. ©Electre 2025

Voilà un récit de vie dont on ne sort pas indemne. Fabienne, la quarantaine, après des années de silence, de déni, d'une forme d'oubli, se souvient. À dix-huit ans elle part aux USA pour une année : un rêve qui se réalise, la grande aventure qui commence. L'impact est de taille, mais l'enthousiasme et l'énergie qui animent la jeune fille lui feront franchir tous les obstacles  : la barrière linguistique s'effrite peu à peu, elle se fait des amis, elle « apprend » le monde. Et puis arrive l'impensable : loin de ses proches, vulnérable, elle subit des abus sexuels qu'elle ne sait pas, qu'elle ne peut pas révéler et qui la murent dans une solitude ravageuse. Des années plus tard, tout resurgit et a besoin de « sortir ». Avec une écriture puissante, tout à la fois factuelle et littéraire, Fabienne Héritier nous fait partager ce voyage au bout de soi-même. D'une lucidité impitoyable, dénué de toute complaisance ou apitoiement, ce récit nous révèle une personnalité forte et profonde, hors du commun qui, envers et contre tout, a choisi la vie.

« Les mots écorchent l'air. Le choc est brutal. Une angoisse surgit du jet de ses mots et tapisse le creux de mes reins. Elle me statufie.
L'énergie du déni violente l'instinct. Il ne peut pas y avoir de problèmes. Cette maison a été désignée comme étant mienne. Je suis chez moi. En sécurité.
Il est mon papa d'accueil, je suis son hôte, les rôles sont clairement distribués. Je ne veux pas entendre ça. Il va se rendre compte du ridicule de la situation. Ce n'est pas possible autrement.
Dedans, sous mon crâne, je déconnecte toutes les alarmes qui avaient viré au rouge écarlate de l'inquiétude. Les unes après les autres.
Obstinément. Elles finissent par se taire dans ma tête mais, à mon insu, la peur s'infiltre dans mes tripes. J'impose la souplesse et le calme à mes mots, à mes mouvements. »