Un coup de coeur de Mollat
Pour quelles raisons le mot « objet » est-il employé pour désigner un être vivant ?
Depuis l'Antiquité, théologiens, philosophes, juristes débâtent autour de ce quadrupède canin qui nous est si familier aujourd'hui. Son acceptation au sein de la société fut longue, difficile et longtemps douloureuse pour lui à qui l'on n'attribuait aucune aptitude à penser, ressentir, une absence d'âme qui le condamnait fermement à n'être qu'un animal-machine.
Napoléon et son code civil lui donnèrent un statut quelque peu différent : en 1804, le chien est considéré comme un bien, victime de la notion de droit à la propriété au bon vouloir de son maître, il est objet et non sujet de droit…
Il faudra attendre le général Grammont et la loi du même nom le 2 juillet 1850 pour reconnaître au chien sa sensibilité. Le XXe siècle et particulièrement la Ve République établiront des lois qui ne cesseront d'améliorer son statut et viseront à reconnaître qu'il peut être à la fois un animal de compagnie et un animal utile sans pour autant que cette seconde possibilité permettent l'intolérable.
A travers ce sujet atypique, merveilleusement bien traité par l'auteur, se dessinent les contours peu flatteurs d'une forte tendance à l'anthropocentrisme. La relation complexe qui unit l'homme et le chien en dit long sur les structures de nos sociétés, qu'elles soient d'ordre moral, économique, politique ou juridique. L'on perçoit dans ce texte l'évolution des mœurs, de la pensée, de la sensibilité d'une société sans cesse en mutation.