Un coup de coeur de Mollat
L'avancée des Alliés rythme le récit et lui confère une urgence presque palpable. L'enquête de Domecq se heurte aux pouvoirs en place avec lesquels il faut composer, de la préfecture de Police sous l'autorité du régime de Vichy au général Oberg, commandant des SS à Paris, en passant par les différentes sections, parfois rivales, du fameux Corps Noir, soit la Gestapo française. Un espion anglais, arrêté pendant le vol des tableaux, se comporte de manière aussi trouble avec ses tortionnaires qu'avec ses "alliés" et rend encore plus complexe les relations entre des personnages toujours ambivalents. Tous, ou presque, font salon dans les endroits à la mode, comme le Perroquet Bleu ou lors des cocktails organisés par Dora Belle, maîtresse de Oberg et amie de Domecq ; on y croise des industriels, des dignitaires allemands et Cocteau ou Guitry, il y règne une opulence surprenante alors que les privations touchent quasiment toute la population...
Grace à une écriture au rasoir, nette et précise, renouant brillamment avec l'écriture comportementale chère à Richard Stark et à Jean-Patrick Manchette, Dominique Manotti dresse le constat, violent et dénué de tout moralisme, d'une époque contrastée. Un magnifique roman noir. Vraiment noir...