Un coup de coeur de Mollat
Face aux trois pouvoirs de la démocratie, à côté du quatrième pouvoir médiatique, il y avait place, à son avis, pour un cinquième pouvoir, représentant les forces productives, les créateurs de richesses, les décideurs de l'économie.
Si l'on veut expliquer la vie politique française, il est indispensable d'étudier l'influence que les décideurs du monde économique, les grands patrons et les hommes d'affaires ont exercé sur les pouvoirs républicains. Dès le début de la III° République, une sorte de contrat s'est établi entre les représentants du monde économique et les détenteurs du pouvoir politique. Un lien social s'est créé, enserrant les élites dans un faisceau d'intérêts et d'objectifs communs. Les hommes d'affaires et les grands industriels ont investi massivement les travées de l'Assemblée Nationale et les postes ministériels et c'est dans les couloirs de la bourse ou dans les antichambres des conseils d'administration que s'est joué et que se joue encore une grande partie de l'avenir du régime républicain.
Attention ! Jean Garrigues ne fait pas que dresser un tableau de la corruption, des pots de vin, des intérêts privés ou des services rendus. Il montre que la vie politique est régie par d'autres forces qui sont autant de contre-pouvoirs : les partis évidemment, les mouvements, les ligues, les syndicats, la presse, l'édition et l'establishment culturel sont autant de territoires où l'influence du monde économique tend à se déployer.
L'auteur ne cherche pas à dresser un bilan global des pressions exercées par les hommes d'argent sur la vie politique républicaine. Il tend à décrire leurs initiatives à expliquer leurs motivations et à en souligner leurs contradictions. Peu de soufre donc, mais un livre engagée en faveur de l'entrée des patrons dans le jeu démocratique moderne.