Un coup de coeur de Mollat
Avec l'édition des Actes du Tribunal Révolutionnaire, Gérard Walter fait oeuvre politique de transmission d'une mémoire douloureuse, dont les manuels d'histoire parlent peu.
La lecture des procès verbaux nous renvoie directement dans la salle du Tribunal criminel extraordinaire, face à l'accusateur public.
Dans cette période de troubles et de massacres que vivait la France, le tribunal, créé en 1793, lutte alors contre toute entreprise contre-révolutionnaire. Danton déclarera d'ailleurs : "Soyons terribles pour dispenser le peuple de l'être."
En dix sept mois d'existence, l'adjectif employé prendra toute sa dimension. De l'ère des procès pour une justice équitable on passe à l'ère des exécutions sous l'index pointé de l'incarnation même de la Terreur : l'accusateur Antoine-Quentin Fouquier-Tinville. Le dernier juge nommé, René-François Dumas, ouvrira lui aussi grandement la porte vers la guillotine en annonçant que la "clémence est parricide."
Gérard Walter déroule ici, le feuilleton tragique de ces grandes audiences et redonne vie à des personnages comme Charlotte Corday, Marie-Antoinette, les Girondins ou Danton, dans la réalité de leur parole d'accusés.
De procès en procès, on avance dans la violence des dénonciations, des accusations et de la sentence, mais le commentateur est là pour qu'on se souvienne que cette machine à justice a permis avant tout de museler les excès de la rage populaire. Il a su aussi très bien resitué chaque personnage par une mini biographie politique avant le retranscritpion de chaque procès.
Trois cents ans après, cette édition conserve toute son actualité, en nous rappellant combien les lendemains de révolution sont fragiles et comment sur la base de la dénonciation peut se mettre en place une justice partisane.