Un coup de coeur de Mollat
En effet, dans cette brève histoire, Alessandro Barbero met à mal certains clichés et souligne la paradoxale relation qui unissait l'occident chrétien et les ottomans à dominance islamique. Car si une haine commune animait les deux parties, barbares d'un côté, ignorants de l'autre, un certain respect s'était peu à peu installé entre eux. Puis vînt le temps des batailles, des victoires et des défaites, Lépante, les Grecs, la première guerre mondiale. Et la proclamation de la république Turque en 1922 qui mettra définitivement fin à un empire présent depuis plus de cinq siècles.
D'Osman Ier à Atatürk en passant par Soliman ou Mahmud II, on découvre un empire complexe, autant dans son gouvernement, le divan, que dans sa société. Constantinople en fût le symbole par une cohabitation habile entre juifs, chrétiens et musulmans ; par l'accueil de réfugiés, entre guillemets, qui ne trouvaient pas leur place en occident ou qui étaient persécutés et semblaient voir en cette ville, une porte de sortie où ils pourraient être en paix. Une généreuse tolérance à l'heure de l'inquisition en occident ou d'un antisémitisme naissant au XIXe siècle qu'on oublie volontiers à l'heure actuelle. Bien sûr l'auteur ne dresse pas qu'un portrait utopique de cet empire, les non-musulmans devaient payer un impôt supplémentaire, les sultans avaient le droit de vie ou de mort sur leurs vizirs, l'abondance de nourriture pour le sérail était telle qu'elle en était outrancière (on parle de 1 000 moutons par jour pour tout le sérail !) .
Bref, on est dans une histoire globale tout en esquissant des détails subtils qui nous permettent de mieux comprendre et appréhender une culture, un peuple et son histoire.
Un livre passionnant donc, rythmé par des chapitres courts et efficaces qui dressent un portrait d'un empire désenchanté.