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Chambre à louer

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Publié le 24/06/2008
Albert Cossery est mort le 22 juin à Paris. Auteur du légendaire Mendiants et orgueilleux, il habitait, depuis 1945, une modeste chambre à l'hôtel La Louisiane.

Une belle tête défaite de dandy fauché. Un regard illisible dans lequel pourtant on croit deviner l'affection que, malgré tout, il portait encore au monde. Albert Cossery demeurera désormais figé dans cette pose pour photographe qui l'a saisi dans son vieil âge, icône d'une bohème qui fut artiste avant d'être bourgeoise.

Né au Caire en 1913, Albert Cossery a étudié dans les établissements français de la capitale Egyptienne. En 1940, il publie son premier roman, Les hommes oubliés de Dieu. En 1945, il se rend à Paris, où il demeurera jusqu'à la fin de ses jours. Cultivant une paresse heureuse et un dénuement assumé, Cossery publiera cinq autres romans en soixante ans. Un livre tous les dix ans environ, bon rythme pour celui qui prétendait n'écrire « qu'une phrase ou deux par jour ». La maison de la mort certaine , Les fainéants de la vallée fertile , Mendiants et orgueilleux , La violence et la dérision , Un complot de saltimbanques , Une ambition dans le désert , Les couleurs de l'infamie composent donc toute son œuvre, complétés par un recueil de poèmes, Les Morsures , et une adaptation théâtrale des Fainéants… publiée en 2004.

Germanopratin, il fut l'ami de Camus, de Juliette Gréco, d'Henri Miller, l'amant de fort nombreuses femmes et un agréable compagnon pour bien des copains de fortune.

Hanté par l'Egypte de sa jeunesse, il en fait le théâtre de son œuvre, réinventant avec humour et une bonne dose de férocité le grand et petit peuple du Caire. Philosophe de la faiblesse, il choisira, au contraire de Cioran, le parti pris de la paresse et d'un certain détachement. Lucides, pourtant, ses romans disent aussi la violence et le mépris de riches pour les pauvres, des forts pour les faibles et la bassesse dont tous sont souvent capables.

Dans les années 80, Joëlle Losfeld, alors journaliste à jeune Afrique, redécouvrira Albert Cossery alors qu'elle entamait une série de portraits d'écrivains. De cette rencontre viendra la consécration. La jeune journaliste devenue éditrice, réédite l'œuvre du dandy égyptien et le fait connaître d'un plus large public. Son chef d'œuvre, Mendiants et orgueilleux, rencontre un véritable succès public et critique et fait désormais figure de classique.

Albert Cossery sortait chaque jour de son hôtel, rasé de frais, peigné et cravaté de couleur. Il faisait alors sa promenade, qui le menait inévitablement aux terrasses du Flore ou du Chais de l'abbaye. Puis il rentrait chez lui et faisait la sieste. Albert Cossery appartient désormais à la longue litanie des fantômes qui hantent Saint-Germain-des-Prés : Henry Miller, Camus, Bud Powell, Boris Vian, Mouloudji qui tous furent ses amis.

Pour en savoir davantage : voir les livres d'Albert Cossery sur notre site.




Albert CosseryPhoto : DR