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Vendanges littéraires (3)

Publié le 19/09/2003
Parmi les quelques 700 romans parus en ces mois d'automne, certains, évidemment, se détachent du lot. Isabelle, Martine, François et David, libraires du rayon Littérature, ont lu et choisi pour vous...

La porte
Magda Szabo, Viviane Hamy

Traduite en France pour la première fois, cette romancière Hongroise est à découvrir de toute urgence !La narratrice relate sa relation avec Emérence qui fut sa servante pendant vingt ans ; leurs deux personnalités vont tour à tour les affronter parfois avec violence, et les rapprocher d'une manière passionnelle. Mêlant les souvenirs, les manques liés à l'enfance, et une profonde admiration réciproque, l'auteur s'attache à analyser ce qui, dans la rencontre de deux êtres diamétralement opposées, fascine. La porte, élément symbolique du récit, dès lors qu'elle sera enfreinte, sera un déclencheur fatal.

Martine Borderie

 

La maison muette
Robert Burnside, Métailié

"L'expérience" doit être, avant toute chose, précédée d'un avertissement qui protégerait ou préviendrait les âmes les plus sensibles et conforterait l'ensemble des lecteurs dans l'idée que nous avons bien là une fiction. L'auteur, par certains effets de style employés tout au long du roman, affecte un détachement compréhensible et amplifié à mesure que la psychologie du narrateur s'ordonne vers une logique scientifique où le sentiment est une entrave au bon fonctionnement des opérations. De quoi peut bien retourner cette "expérience" ? Du langage, de la naissance du langage. Comment communique t-on et pourrions nous communiquer si l'on nous privait dès la naissance de toutes les béquilles qui nous servent peu à peu à trouver notre parole et les mots qui sont les clés de notre entrée dans le monde ?

John Burnside a réussi là un roman fantastique, son personnage détient la puissance et la folie des plus grands expérimentateurs de la littérature, tout siècle confondu, mais à la différence que ses actes s'inscrivent dans la plus parfaite normalité. Nous sommes au XXe siècle, cela pourrait avoir lieu n'importe où, les circonstances favorables qui participent à l'élaboration de "l'expérience" sont loin d'être insurmontables, seule la psychologie, son mystère, détermine la volonté de pousser un homme à commettre ce qu'il ne pourrait en aucun cas avouer comme des atrocités mais comme une avancée déterminante dans l'étude des comportements humains. Le pire c'est qu'on le comprend et qu'on ne lâche plus ce livre jusqu'à sa fin.

François Boyer

 

Mathieu disparaît
Patrice Robin, POL

"Beau travail", c'est ainsi qu'à la manière de Claire Denis on pourrait rendre hommage au style émouvant et pourtant très pudique de Patrice Robin. A la lecture de Mathieu disparaît on retrouve cette maîtrise de la composition déjà appréciée dans "les muscles", son premier roman, mais aussi une puissance descriptive qui émerge d'autant mieux que la passion pour le cinéma sert de fil conducteur à l'histoire.

Mathieu donc, filme avec sa caméra d'amateur les petits événements animaliers de l'étang près de chez lui. Il aimerait suivre des cours de cinéma et pour cela quitter ses études mais la relation empreinte de distance avec ses parents ne lui permet que difficilement d'affirmer sa vocation. Sa disparition, bien réelle aux yeux de sa famille et de la petite ville de province où il naquit, l'emmènera au coeur des chantier navals où il exercera un tout autre métier que celui de cinéaste. L'expérience pourtant l'enrichit, évoluer parmi des ouvriers lui ouvre un monde inédit qu'il observe avec le même étonnement et la même acuité que lorsqu'il s'en allait filmer les animaux de l'étang. Il demeurera pourtant un personnage extérieur pour les autres travailleurs comme s'il y avait une tare à être bachelier pour construire des bateaux.

Roman initiatique, passage au monde adulte, ébauche d'une vie à deux, l'expérience de Mathieu aboutira quand bien même sur les marches de la croisette inaugurant alors quelque chose de nouveau qui vaudra certainement matière à une autre histoire pour cet encore jeune auteur plein de talents.

François Boyer

 

La partie de cartes
Adolf Schroder, Flammarion

En forme de puzzle, cette histoire campe deux personnages : une vieille femme enfermée dans une profonde solitude et de tragiques souvenirs dont elle cherche à se délivrer, et un étudiant recruté pour quelques jours par cette dernière pour l'aider à trier un courrier énigmatique.

Il va se retrouver malgré lui au cœur d'une machination, au cours d'une étrange partie de cartes...

Martine Borderie

 

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Bibliographie