Un coup de coeur de Mollat
E.S. Herman et D. Peterson citent des exemples de conflits où sont principalement intervenus les Etats-Unis, mais nous comprenons au fil des pages qu'une part de responsabilité revient également à l'Union Européenne ou l'ONU. A travers deux tableaux qui serviront de base pour toute la lecture, les auteurs démontrent comment la presse réussit à manipuler l'opinion publique grâce au choix de l'emploi d'expressions comme « génocide », « crimes de guerre », « crimes contre l'humanité ». Cette manipulation de la pensée, à travers un jeu de dramatisation ou de minimisation des faits, permettant ensuite aux autorités d'arriver à leurs fins, c'est-à-dire d'intervenir dans les conflits internationaux pour asseoir leur pouvoir. Il est flagrant de constater que le mot « génocide » est systématiquement associé aux actes des ennemis des États-Unis. Par exemple, lors du massacre du peuple kurde par la Turquie et l'Irak entre autres, « génocide » sera employé dans la presse américaine dix fois plus pour l'Irak (ennemi des États-Unis) que pour la Turquie (alliée). Et ce mot n'apparaît quasiment jamais lorsqu'il est question du million de victimes tuées en Irak par les Américains en 2003.
La façon de relater les faits tient un rôle décisif dans cette « instrumentalisation politique des massacres ». Les événements sont tournés de façon très manichéenne : nous ne faisons que nous défendre face à des ennemis qui eux font preuve de terrorisme. C'est ainsi que l'opinion publique se persuade du bien fondé de nos interventions militaires même le sang de millions de morts, civils ou non, doit couler.
Ce livre se fait l'écho des enquêtes menées pour dénoncer cette grave manipulation. Malheureusement, rares sont celles qui ont abouti face à la « culture d'impunité » dont bénéficient les grands grâce à leur écrasante supériorité économique et politique.