Un coup de coeur de Monica
Il n'y reste que deux habitants, Sergueïtch et Pachka, les seuls à ne pas avoir fui plus à l'Ouest, à l'abri des bombardements, des snipers et de du grondement perpétuel de la guerre.
Amis / ennemis, il n'y a que la solitude qui puisse les rapprocher: ils n'ont jamais été complices, loin de là. En temps de guerre, en revanche, perdus au milieu de la campagne ukrainienne, dans leurs maisons proches de l'église bombardée, une trêve s'installe.
Et si le narrateur choisit de mettre la focale sur Sergueïtch, dont on accompagne le quotidien jusque dans ses pensées, on retrouve dans ce couple mal assorti toute la tension qui règne dans la région du Donbass. Le noms des rues: Chevtchenko et Lénine. Les soldats que chacun fréquente, par pur hasard ou par choix. Les opinions sur la guerre.
Par petites touches, Kourkov reconstitue à travers deux personnages la vie de cette région déchirée, meurtrie.
Mais Sergueïtch a un filet de secours: ses abeilles. Elles représentent tout pour ce divorcé esseulé et nostalgique. Elles sont la "vie d'avant" mais aussi la possibilité d'un avenir.
Aussi s'en va-t-il dès l'arrivée du printemps, la voiture chargée par ses ruches, chercher un endroit paisible pour ses abeilles, en espérant laisser la guerre derrière lui.
"Les abeilles grises" est un texte rempli d'humanisme, de tendresse. Andreï Kourkov parvient toujours à distiller de la douceur, même dans l'enfer de la guerre.
A lire absolument!