Un coup de coeur de Anthony G.
S’inscrivant dans la lignée de Victor Klemperer qui avait fort bien analysé les liens entre langage et pensée nazie, l’auteur interroge le rôle du vocabulaire quotidien issu de l’informatique dans notre structure de pensée contemporaine. À l'évidence, le langage machine sert la rationalisation du monde. Le rapport à la parole tend à devenir purement fonctionnel. Celle-ci sert non plus à parler mais à communiquer des informations. Dans les débats télévisés ou discours politiques, les mots font dans la généralité et la statistique. Le discours en devient totalisant et calculant. In fine, en se calquant sur le langage informatique qui ne permet ni intonation, ni énonciation, ni nuance, le langage courant s’aplatit, se diminue ; il formate nos pratiques et limite nos choix.
L’hypothèse du psychiatre est la suivante : cette contamination du langage quotidien par le langage machine, plutôt que subie, n'est-elle pas inconsciemment souhaitée et choisie ? Étymologiquement, l'ordinateur est celui qui ordonne. Ainsi la rationalité scientifique du monde fait figure de grand récit contemporain. Et il est parfaitement logique que celui-ci s'écrive en langage informatique.
À travers ce journal de bord passionnant rythmé de notes d'humour, c'est à ces réflexions (et d'autres) que nous invite avec brio Yann Diener.