Un coup de coeur de Océane
C'est une fiction post-apocalyptique comme on en voit rarement. L'univers s'affranchit des données géoclimatiques et robotiques coutumières pour nous livrer une vraie dystopie linguistique.
Plusieurs siècles après notre ère, l'humanité perdure dans une société individualiste, méfiante et dénuée de parole. Si de rares personnes possèdent encore quelques palabres, c'est surtout par onomatopées et grognements que transitent les informations. Tous sont empêtrés dans leur survie quotidienne, pleine de crasse et de violence. Tous sauf notre narrateur. Il découvre au cours de ses aventures la Grande Bibliothèque et cette trouvaille lui permet de transformer sa caverne en musée et son cerveau en système de pensée. À force, il devient un maestro de la langue avec laquelle il nous raconte son histoire : le français.
Sans suivre de chronologie linéaire, il nous raconte l'étape la plus importante de sa vie : la fois où il a déniché puis séquestré une jeune fille pour en faire sa disciple. Les débuts sont difficiles, mais la tendresse grandira en même temps que les compétences de la jeune fille. Si lui adule la langue dans sa noblesse, elle l'aimera pour sa plasticité, ses sonorités et le terrain de jeu qu'elle constitue. Dans leurs conversations, on retrouve une douce réflexion philosophique à tendance neurolinguistique.
Ce roman s'adresse à vous qui avez aimé 1984 pour le thème et La planète des singes pour l'ambiance. Il s'adresse à vous qui vous êtes déjà demandé si c'est l'homme qui créa la parole ou l'inverse, à vous qui avez déjà songé à la sonorité agressive du "s" et celle plus molle du "m". Sans quoi il vous plaira pour la tendresse de cette relation père-fille née à partir de rien et de la mélancolie du père face à l'inévitable passage à l'âge adulte.