Un coup de coeur de Krystal
Ezra, notre protagoniste, combine fac de lettres et petit boulot de libraire pour arrondir les fins de mois. Néanmoins, sa condition relativement précaire est le cadet de ses soucis. Né d'une mère qui l'a abandonnée, et d'un père qui a préféré se tourner vers un pan plus radical de sa confession juive, Ezra n'a pu trouver de soutien ailleurs, enchaînant les histoires sans lendemain et les amours toxiques. Accablé par une ascendance religieuse dans laquelle il ne se reconnaît pas, dégoûté par le système de l'administration Trump qui, jour après jour, réduit ses droits en tant que personne queer, le jeune homme cherche tant bien que mal à exister, dans un monde qui l'ignore totalement. Alors, il reproduit peu à peu les schémas de violences dont il fut témoin tout au long de sa vie, et développe un goût prononcé pour l'autodestruction, comme dernier acte de résistance et de protestation.
Ce choix audacieux d'écriture qui participe à renforcer la puissance évocatrice et thématique du texte permet également de mettre en avant le style poétique de l'auteur, qui joue sur ces courts paragraphes pour ne rien laisser au hasard, dans une langue moderne et viscérale. Mais surtout, cette mise en page brille par sa capacité à signifier les non-dits, les traumatismes, les moments de souffles après une déclaration ou une pensée trop violente, et instaure un climat haletant, presque anxiogène.
Je finirai par dire que le travail réalisé sur la couverture par l'illustrateur Andrea Settimo, en plus de donner l'eau à la bouche, n'est que la prolongation la plus pure des émotions qui traversent l'ensemble de ce texte, et réussit à nous donner un premier shot d'adrénaline qui ne fera que se concrétiser par la suite.