Une découverte de l'Art nouveau belge à travers les oeuvres de deux grandes figures de la période : Gustave Serrurier et Gisbert Combaz. Au tournant du XXe siècle, leurs travaux révolutionnent le domaine du mobilier ainsi que de la décoration intérieure, notamment en répondant aux commandes de personnalités de l'avant-garde artistique. ©Electre 2025

Tome III

Réalisé sous la direction de Borys Delobbe (CERTA-UCLouvain) et Jonathan Mangelinckx, avec une préface d'Élise Dubreuil (Musée d'Orsay), le troisième tome de la série « Art nouveau belge : Vers l'idéal » explore les créations de deux figures incontournables du souffle de renouveau qui anima les arts décoratifs en Belgique dès le début des années 1890 : Gustave Serrurier et Gisbert Combaz.

Acteur d'envergure internationale dans le domaine du mobilier et de la décoration intérieure, Gustave Serrurier (1858-1910) ne serait vraisemblablement jamais devenu un tel précurseur du design sans sa rencontre en 1884 avec Maria Bovy, une talentueuse commerçante liégeoise. Leurs deux noms associés, « Serrurier-Bovy », s'en retrouvèrent durablement inscrits dans l'histoire des arts appliqués : les objets et projets décoratifs conçus et réalisés à Liège, puis distribués à travers un réseau autonome de magasins situés en Belgique et à l'étranger, témoignent d'une maîtrise unique au niveau artistique, entrepreneurial et commercial.

Cet ouvrage propose d'explorer certaines zones d'ombre qui persistent dans la connaissance de la contribution apportée par Serrurier, Serrurier-Bovy et Serrurier & Cie au façonnement de l'Art nouveau belge : Benjamin Zurtrassen (Musée Horta) y interroge de manière inédite plusieurs commandes pour des personnalités de l'avant-garde artistique, la production de tissus d'ameublement ainsi que la capacité des ateliers liégeois à réellement mettre le beau à la portée des classes moins favorisées.

Destinés à « donner satisfaction aux besoins matériels et intellectuels de l'homme », selon les propres mots de Gisbert Combaz (1869-1941), les innombrables produits décoratifs nés de son imagination couvrent un très large spectre. Sous l'oeil de Jane Block (University of Illinois, Urbana-Champaign - Professor Emerita), ses affiches, cartes postales, calendriers, projets de carreaux de céramique et autres travaux graphiques dévoilent une personnalité ancrée dans l'observation de la nature et dotée d'une curiosité intellectuelle hors du commun, notamment pour les arts du Japon.

La grande variété des sources d'inspiration des protagonistes de l'Art nouveau en Belgique constitue un horizon de recherche réservant encore bien des surprises : le démêlement auquel procède ici Benjamin Zurstrassen de leur enracinement profond dans les créations britanniques contemporaines, et ce en particulier pour l'oeuvre de Gustave Serrurier, va de pair avec une réflexion plus large, menée par Alexandra Van Puyvelde (MRAH), sur la réception de l'art du monde islamique dans l'imaginaire collectif à cette époque en Europe. Avec une figure clef pour la Belgique dans le domaine des textiles : la collectionneuse, mécène et chercheuse Isabella Errera (1869-1929).

Art nouveau belge : vers l'idéal

Les Éditions du Musée Horta et le collectionneur Jonathan Mangelinckx ont pris l'initiative de produire une série d'ouvrages collectifs, réunis sous le label « Art nouveau belge : Vers l'idéal », avec pour ambition d'être aussi bien des chaînons manquants au niveau scientifique que des publications abordables pour le grand public.

Au Au tournant du XIX^e siècle, à un moment où la peinture et la sculpture avaient déjà accompli leurs propres révolutions, toute une jeune génération d'architectes et d'artistes-artisans s'employa en Belgique à brouiller les frontières entre les beaux-arts et les arts appliqués, les « arts majeurs » et les « arts mineurs », le dessin face à la couleur. Leur objectif ? Se libérer du carcan des styles du passé en vue d'embrasser une esthétique nouvelle, et ainsi créer des objets aussi beaux qu'adaptés aux besoins intellectuels et matériels de l'époque. Le succès fut rapidement au rendez-vous pour ces rénovateurs de l'art décoratif, en Belgique comme à l'étranger, mais la chute fut d'autant plus brutale : au fil du XX^e siècle, la plupart d'entre eux tombèrent dans l'oubli et bon nombre de leurs créations, devenues obscures, furent éparpillées, égarées ou tout simplement détruites. À l'inverse de l'architecture, les arts appliqués demeurent aujourd'hui encore largement méconnus pour la période de l'Art nouveau en Belgique.