Ce catalogue analyse comment s'est faite l'aryanisation en Allemagne (1933-1940), en France (1940-1945) et dans l'Italie fasciste afin de spolier les Juifs de l'ensemble de leurs biens. Un processus qui apparaît comme l'un des rouages de la solution finale. ©Electre 2024

Dès 1933 le régime Nazi lance une politique de guerre économique contre la population juive dans le III^e Reich, multipliant campagnes de boycott et expropriations sauvages, avant de généraliser la dépossession. Devenue politique d'État, cette politique de spoliations des entreprises appartenant aux juifs - entrée dans l'histoire sous le nom d'« aryanisation », un néologisme de la langue Nazie - s'étend à partir de la fin des années 1930 aux régimes alliés de l'Allemagne Nazie, ainsi qu'aux territoires occupés par cette dernière.

Appliquée en France dès l'automne 1940 par l'occupant, l'« aryanisation » est intégrée dans la politique antisémite de l'État français en 1941. Dès sa création au printemps 1941, le commissariat général aux questions juives est chargé de mener à bien la dépossession, officialisée par la loi du 22 juillet 1941 qui se donne pour but d'« éliminer toute influence juive dans l'économie nationale ». La spoliation systématique des entreprises et, plus largement, des biens appartenant aux juifs est ainsi engagée sur l'ensemble du territoire français.

De l'identification des juifs et de leurs biens jusqu'à l'« aryanisation » de ces derniers par la vente ou la liquidation, c'est un processus efficace qui est mis en place, appuyé sur une multitude d'administrations : au-delà du seul CGQJ, mairies, préfectures, police, justice ou encore services fiscaux et financiers, tous ont été appelés à jouer un rôle dans cette politique. Mais au-delà des administrations, ce sont aussi de larges pans de la société française qui en permettent la réalisation, depuis les différents experts (comptables, architectes...) intervenant dans la préparation des ventes jusqu'aux notaires et commissaires-priseurs qui les réalisent, en passant par les candidats à l'acquisition de ces biens.

Car, à la différence de la majorité des politiques antisémites alors mises en oeuvre, l'« aryanisation » en appelle largement à la participation de la population, sans laquelle cette politique ne peut réussir. Afin de trouver des acquéreurs aux biens mis en vente, cette politique est fortement publicisée par des annonces dans la presse et par voie d'affiches, marquant magasins et biens immobiliers ou signalant l'organisation des ventes.

Les spoliations, en France et plus largement en Europe, furent un rouage essentiel du processus d'exclusion, qui facilita par la suite la mise en oeuvre de la « solution finale de la question juive ».